Une histoire d’amour, une aventure indochinoise, une récupération à but très lucratif, un roman qui n’est pas vraiment une belle histoire, Avant l’heure du Tigre, La Voie Malraux repose sur deux faits précis. Clara Malraux et André ont formé un coupe d’exception. Grands spécialistes de l’art Khmer, ils voulaient se refaire une santé financière en pillant l’un des temples oubliés d’Angkor. Un peu réducteur ce résumé car Virginie Greiner et Daphné Collignon ont signé une belle biographie sur ces années mouvementées, l’après grande guerre pour le couple Malraux. La suite, ce sera La Condition humaine, la guerre d’Espagne avec Cot et Moulin, la Résistance un peu tardive, la Brigade Alsace-Lorraine en 1944 et un certain De Gaulle qui fera de Malraux un ministre des affaires culturelles unique et transcendé.
A vingt-trois ans, Clara Goldschmidt est jolie, intelligente et riche. Elle est traductrice des œuvres les plus difficiles des poètes allemands pour le journal L’Action. Elle en devient actionnaire, rencontre tout le gratin du Paris intellectuel des années vingt. Les idées sont révolutionnaires. André Malraux fait partie du groupe avec Max Jacob. Clara tombe amoureuse de Malraux, un érudit un brin misogyne. Ils se marient contraints et forcés, sous peine que Clara soit déshéritée. Malraux est un fou de l’art oriental et en particulier d’Indochine dont les temples d’Angkor au Cambodge sont un fleuron. Germe en lui une idée assez tordue, voler et vendre à des collectionneurs des bas-reliefs et statues d’un des temples d’Angkor. Clara et lui jouent leur va-tout et partent dans une expédition étonnante qui va tourner au cauchemar car on les attend au tournant.
Bien sûr, tout est vrai dans cette histoire. Clara et André finiront par divorcer. Un épisode que l’on passera ensuite souvent sous silence une fois que Malraux sera devenu une personnalité politique et intellectuelle. Malraux était aussi un aventurier. Daphné Collignon le dessine d’ailleurs avec ce look et donne un ton prenant à l’album. Malraux a croisé souvent la route de Sartre auquel aussi vient d’être consacré un album. Dans les années soixante-dix, comme pour l’Espagne il avait voulu lever une légion de volontaires pour aller se battre au Bangladesh. On avait sonné à sa porte pour prendre avec lui la voie Malraux. Il n’a pas répondu. Dommage, l’homme était d’exception, génial, flagorneur, mythomane, mythique, brillant, délirant.
Avant l’heure du tigre, La Voie Malraux, Glénat, 22 €
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