Dans Le Vent des Cimes Christian Perrissin, pour le crayon de Éric Buche, raconte le destin d’un couple de pilotes. On est en Amérique du Sud au début des années trente. Le courrier doit passer. L’Aéropostale est le décor de cette histoire de passion partagée. Un album qui a le souffle des drames antiques où le héros, Jack Rouault, ne pourra jamais trouver le bonheur. Christian Perrissin (Barbe Rouge, Martha Jane Cannery, Kongo), pour la sortie de cet album très fort chez Glénat, a répondu en direct aux questions de Ligne Claire.
J’ai toujours été intéressé par les personnages de cette épopée. Mermoz, Saint-Ex, Guillaumet, des hommes étonnants de courage et d’abnégation. Eric Buche est lui un passionné d’aviation côté machines. On se connaît depuis vingt ans et on s’était promis de travailler ensemble. On s’est rejoint sur ce sujet après bien des discussions, la conquête de la ligne au-dessus de la Cordillère des Andes. Le projet date de 2009, 2010.
Vous y apportez par contre une touche romanesque avec le personnage de Rachel Wiezman, pilote elle-aussi, et amoureuse de Jack Rouault, le héros dont l’avion s’écrase dans la montagne.
On voulait de toute façon éviter une histoire de guerre. Donc la partie Aéropostale et ouverture des lignes pour le courrier était parfaite. Et j’ai voulu intégrer justement une partie sentimentale avec Rachel, fille d’un pilote allemand venu en 1920 s’installer en Argentine comme instructeur. Rachel devient pilote et fait de la voltige car les femmes n’étaient pas acceptées sur les lignes aériennes. Elle va rencontrer Rouault et vivre en direct le drame de son accident, encore plus concernée car elle l’aime mais est aussi pilote et veut aller le chercher.
Comment avez-vous construit vos personnages ? On pense à Mermoz pour Rouault mais également à Guillaumet. L’action aurait pu se passer sur la cote marocaine et les premiers pas de l’Aéropostale en Afrique.
Il a fallu effectivement avant tout choisir le lieu. J’étais très tenté par le désert comme vous le dites. Cap Juby, Mermoz déjà et Saint-Ex. Mais je ne suis pas arrivé à me faire une idée précise des images à écrire pour que l’action se passe dans le désert. En plus j’aurai eu beaucoup de mal à placer le rôle féminin dans ce contexte. Pour Rouault c’est bien sûr un mélange de Mermoz, Guillaumet qui ont vécu des aventures similaires, une synthèse de tous les pilotes de la ligne. J’en ai fait un condensé. Pour le chef d’escale Gerbier je me suis inspiré de Didier Daurat. Et Antoine de Capuçon, l’ami de Rouault, c’est Saint-Exupéry.
Idem pour l’accident de Rouault ?
Oui, Mermoz s’est posé sur un sommet et réussi avec Collenot, qui mourra avec lui en 1936, à redécoller en rebondissant sur un piton comme sur un tremplin. Il réussit à arrêter son avion en sautant bloquer la roue comme le fera Rachel. Guillaumet a marché pendants des jours dans la neige. J’ai relu aussi le Mermoz de Kessel et Saint-Ex.
Sans dévoiler la fin il fallait obligatoirement ce côté tragique ?
Une fin heureuse était difficile. Il fallait qu’elle soit surtout inattendue…
Eric Buche est l’auteur de Franky Snow. On n’est pas dans le même registre et pourtant il montre avec Le Vent des Cimes une belle maîtrise d’un style semi-réaliste.
Après ce décollage avec Le Vent des Cimes un autre projet aéronautique ?
Pas obligatoirement. Encore que j’ai bien une envie, traiter des kamikazes japonais qui n’étaient pas que des fanatiques. J’aimerai garder le format quelque soit le sujet du Vent des Cimes et retravailler avec Eric Buche. Chez Futuropolis j’avance sur un autre projet avec Guillaume Martinez.
propos recueillis par Jean-Laurent TRUC
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