Le pensionnat des Oiseaux, ou des Ursulines, de la Merci et autres Nevers ou Assomption (repères familiaux), c’était avant. Des endroits sanctifiés bien sûr où les jeunes filles (mères, grands-mères, sœurs) se retrouvaient coincées pendant des années et généralement libérées pour bonne conduite, bac obtenu ou mariage en vue. Florence Cestac a donné dans le genre, jeune fille qui voulait à tout prix mettre le plus de distance possible entre sa famille BCBG et elle, déjà révolutionnaire en herbe. Dans Filles des Oiseaux, elle conte la vie de la jeune Thérèse. On est dans les années soixante et il n’est pas encore interdit d’interdire mais le printemps 1968 n’est pas très loin. Thérèse c’est un peu, beaucoup, passionnément Florence. De sa ferme natale et de son paternel alcoolique, Thérèse en a ras le bol. Alors le pensionnat ou la Légion Étrangère. Dans la Légion ils ne prennent pas les femmes et les mineurs. Dommage on aurait rigolé. Donc c’est la chronique du pensionnat que Florence Cestac nous livre, en sanguine sans technicolor sauf à la fin, drôle, émouvant et, juré, tout ce qu’elle dit c’est du garanti authentique. On a des preuves.
Aux Oiseaux, Thérèse en prend huit ans fermes, au moins. Et elle rencontre celle qui va devenir sa meilleure amie, une riche mais marrante, Marie-Colombe. Les louves sont dans la bergerie. Marie-Colombe va éduquer la terrienne sur les us et coutumes des Oiseaux et de sa volaille, les toutes puissantes sœurs et leur mère directrice rasées de frais. Thérèse et ses copines découvrent la vie et font tourner les sœurs en bourrique mais elles s’abonnent à la colle du dimanche, coincées au pensionnat pour mauvaise conduite. Elles feront la paix histoire de pouvoir aller passer un week-end chez Marie-Colombe. Thérèse découvre le luxe, la Mercedes et d’être servie à table. Quand elle rend son invitation à Marie-Colombe, la branchée XVIe flashe sur Jean-Marie le grand-frère de Thérèse malgré le paternel bourré et la soupe à la graisse de la maman. Elle n’apprécie pas, Thérèse, car elle a bien compris que la vache va aller au taureau comme on dit à la campagne.
On est, assassinat de Kennedy oblige, en 1963. Comme le montre Florence Cestac, tous les jeunes ados cette époque se souviennent comment ils ont appris cet évènement planétaire, la mort d’Oswald et vu les obsèques du président. On peut témoigner. Hippies, ce sera pour plus tard comme la pilule, Londres et les voyages en Suisse ou en Angleterre avant la loi de Madame Weil. 1968 clôture ce premier tome qui oscille entre rire et larmes, sans jamais tomber dans le dramatique pontifiant. C’est pas son style. Florence Cestac sait aimer la vie et la raconter. On craque. Les Oiseaux c’est une histoire d’amitié vraie. Thérèse on la connait grosso modo. On a du la rencontrer. Elle est de son temps, courageuse et rigolote. Les Trente Glorieuses sont en plein boum et on ne parle pas de crise. Le moral est bon et le pensionnat des Oiseaux s’en sortira. Mais les garçons pourront désormais attendre les filles à la sortie. Merci Daniel Cohn Bendit.
Florence Cestac est à la galerie Martel à Paris du 16 septembre au 15 octobre. Elle y présente les planches de Filles des Oiseaux ainsi que des planches de ses précédents albums.
Filles des Oiseaux, Tome 1, N’oubliez jamais que le seigneur vous regarde, Dargaud, 13,99 €
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