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Le Tirailleur, la vie d’un de ces oubliés de la mémoire nationale

C’est au hasard d’un reportage photo dans un foyer que Alain Bujak a rencontré Le Tirailleur. Abdesslem va lui raconter sa vie, celle d’un de ces hommes qui vont se battre et mourir pour la France, un pays qu’ils ne connaissent pas et où on va les envoyer de leur Maroc natal sans, ensuite, leur montrer beaucoup de reconnaissance. Un récit poignant et vrai.

En 1939 Abdesslem montagnard de Taza se laisse convaincre de s’engager dans l’armée française, dans Les Tirailleurs Marocains qui rassemblent des fantassins autochtones. L’uniforme, les camions, tout lui semble beau. Il se fait embarquer de force par des recruteurs. Abdesslem est devenu un soldat pour quatre ans ce qui en 1939 n’allait pas être de tout repos. Il ne voudra pas retourner dans sa famille. La guerre éclate et Abdesslem débarque en France, direction les Vosges. Il tombe aux mains des Allemands qui ont assassiné un bon nombre de soldats africains par racisme. Abdesslem est dans un stalag et travaille sous les coups. Il sera libéré et renvoyé au Maroc. La France est occupée mais les Alliés débarquent. Les Tirailleurs vont se battre pour la libération de la France en passant par la Tunisie et l’Italie. Ce sera Cassino, le Garigliano où ils seront nombreux à mourir. Abdesslem à la fin de la guerre part pour un autre conflit, l’Indochine jusqu’en 1954.

La suite c’est celle d’une pension minime car la France part du Maroc. Pour avoir son allocation Abdesslem doit habiter neuf mois en France loin des siens. Il finira par craquer et rentrer chez lui. Il y a un authentique émotion dans le récit pudique d’Abdesslem transcrit par Alain Bujak et dessiné par Piero Macola d’un trait simple mais précis. Voila un homme qui a vécu le pire, coupé de ses racines, soumis à une discipline de fer, à la mort au quotidien pendant les quatre années de conflit, et qui n’en sera jamais vraiment remercié. Il est fataliste Abdesslem. Il méritait comme ses compagnons marocains cet hommage, qu’on raconte son histoire, qu’on pense à eux que la France a utilisé jusqu’à la mort, qu’on ne les oublie pas. L’album se termine par un cahier de photos.

Le Tirailleur, Futuropolis, 19 €

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