Ils sont GI’s et noirs, dans l’armée US qui poursuit sa course vers l’Allemagne, vers Berlin où les Soviétiques leur interdiront d’aller. Mais c’est une autre histoire. Avec ce tome 9 de Airborne 44, Philippe Jarbinet dont on connait tout le talent, signataire de l’une, si ce n’est la meilleure série BD sur la seconde guerre mondiale, touche un sujet qui a été longtemps ignoré, volontairement, la ségrégation raciale qui régnait dans les unités US. La bataille des Ardennes se prépare, va prendre par surprise les Alliés. On la résumera souvent à la résistance américaine à Bastogne et aux SS de Skorzeny déguisés en GI’s, à la tragédie de Malmedy où les Allemands abattront leurs prisonniers américains. Avec ses deux héros Noirs Jarbinet remet les pendules à l’heure à plus d’un titre.
Virgil lit une lettre de la française inconnue qui lui raconte que son père, Alvin Burdette, a été musicien connu à Paris avant la guerre et qu’elle était sa compagne. Son ami Gus lui offre une guitare. Nice vient d’être libérée. Virgil joue et une jeune française lui dit se souvenir de son père. Deux paras US ne supportent pas qu’un Noir puisse fraterniser avec une Blanche et, mené par Jay, agresse Virgil qui est embarqué par la Police Militaire. Bien que son patron de colonel dont il est le chauffeur compatisse il le renvoie dans son régiment d’artillerie. Virgil décide de passer par Paris avec deux copains en Jeep. Il veut en profiter pour rencontrer sa belle-mère mais elle est morte. C’est Édith sa demi-sœur qu’il découvre et apprend comment son père qui s’est battu en 1917 en France y est revenu. Alvin est mort en 1934 sans qu’on sache comment.
On comprend vite que les chemins de Virgil et son agresseur blanc, Jay, sont destinés à se recroiser. Et bien sûr ce sera dans les Ardennes où les Alliés sont certains que les Allemands n’ont plus les moyens de passer à l’offensive. Il faudra aussi découvrir le passé de Jay. Évoquer ce racisme évident. Le travail de Philippe Jarbinet est toujours aussi parfait, concis, documenté et humain dans son propos. Les Ardennes, le massacre de prisonniers dont onze GI’s noirs, Jarbinet n’en rajoute pas, et c’est pour cela que son histoire est si forte. On ne dit rien sur le dessin tant il est sans faille. Philippe Jarbinet dans sa postface revient avec une grande franchise sur la génèse de son Airborne. Et explique ses choix, ses influences et comment il décide de privilégier un thème pour ses diptyques. Un album référence comme d’habitude.
Airborne 44, Tome 9, Black Boys, Casterman, 14,50 €
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