Le nom du juge Renaud est resté ancré à jamais dans la mémoire de tout journaliste qui était en fonction dans les années soixante-dix. Comme celui de Robert Boulin, ancien ministre, « suicidé », et dont la fille encore aujourd’hui veut qu’on rouvre l’enquête. Renaud a été abattu à Lyon, premier magistrat assassiné en France depuis la Libération. On sait par qui mais qui a commandité le meurtre ? Il y a une affaire Renaud, comme celles que l’État sait parfois étouffer ou se laisser perdre sur fond de grand banditisme qui arrange tout le monde. Olivier Berlion, en rupture de son excellent Tony Corso, relance le débat avec Le Juge, La République assassinée dont le premier tome vient de paraître. Direction Lyon, capitale des Gaules et, on l’a oublié, haut lieu de la pègre quand le juge Renaud y débarque. Olivier Berlion sera en dédicace le 10 juillet à la librairie Azimuts à Montpellier.
François Renaud a été un résistant, un vrai. Il est juge et muté à Lyon après quinze ans en Afrique. On est en 1966 et Lyon est un haut lieu des trafics en tout genre, jeux, prostitution et les patrons locaux de la pègre se tirent la bourre, pas effrayés par des cadavres si besoins. Jeannot la cuillère, Schnable le roi du flipper, il y a du ramdam près du Rhône et des corps qui flottent. Le juge Renaud est chargé du dossier et il connaît son monde dont Schnable avec qui il a combattu les Allemands. Renaud a une grande gueule et une réputation. Il n’aime pas les types du SAC, les hommes à tout faire du gaullisme. La tension monte et le juge devient Le Shériff, incorruptible et dérangeant même pour certains des ses amis. On est en 1968 et Lyon comme Paris a droit à ses manifs dont une qui va mal finir.
Olivier Berlion a su donner tout le relief et la clarté nécessaire à son récit. Car l’affaire Renaud est un vrai sac de nœuds qui mélange politique, banditisme, fric et justice. Berlion a signé une trilogie et a pris à cœur le destin de Renaud. Un personnage hors normes, le juge, flambeur, amoureux, qui va affronter dans la suite le gang des Lyonnais et mourra le 3 juillet 1975 abattu. Berlion a le dessin qu’il fallait, fort, puissant pour des ambiances qui le sont tout autant avec des personnages sans scrupules. Un beau début ce tome 1, Chicago-sur-Rhône.
Le Juge, La République assassinée, Tome 1, Dargaud, 13,99 €
Articles similaires