Le dernier Adèle Blanc-Sec, le Bébé des Buttes-Chaumont boucle la série mythique dix ans après le T9. Virus, vaccin, Adèle joue sa peau. Jacques Tardi qui avait juré ne faire que dix Adèle en finit et assure que personne ne reprendra son personnage tout en n’étant pas sûr de ne pas la regretter. Terminé Adèle. Alors on ne boude pas son plaisir. Tout pourrait bien finir où tout a commencé.
Chez Raoul on picole sec et on a les tentacules qui poussent dans les oreilles grâce à l’élixir du bon docteur Chou. Et ce n’est qu’un début car ensuite c’est en vache qui rit qu’on se transforme. L’épidémie fait rage. Chou empoisonne le bon peuple. Fiasco émule de Fantômas a volé l’antidote et l’a planqué. Mais où ? Brindavoine s’interroge. Adèle Blanc-Sec aussi. Chou a trafiqué sa liqueur Pisco qu’elle sirote avec sa vieille momie préférée qui rajeunit à vue d’œil. Adèle s’offre aussi des tentacules auriculaires et en prime elle a mal aux dents. Mal d’amour ? Chez Raoul, Gaston ex-faux héros de guerre, a assisté en 1918 à l’enlèvement d’un bébé au Parc des Buttes-Chaumont. Il a des états d’âmes. Les bovidés sont légion et les clones d’Adèle font boum. Dandelet, Fluet, Chalazion, Punais, La Chevillard, du beau mauvais monde est au générique.
Dans l’épisode précèdent le sirop du bon docteur Chou faisait des ravages. Ce n’était pas l’homme à tête de choux mais à museau de bovidé. Le commissaire Laumanne se transformait en minotaure, la momie d’Adèle revenait pour un congrès. Brindavoine espérait faire fortune avec un antidote contre cette peste bovine. Et tout le monde voulait la peau d’Adèle. Jacques Tardi avoue que « continuer Adèle m’avait agacé. J’ai eu envie de faire autre chose. J’ai arrêté au 9. Mais il y avait deux soucis. Charles dans ce tome dit à Brindavoine touché par le virus (on est en 2007 NDLR) « Lucien, on trouve la formule, on fait un antidote, on redevient jeune et beau. On fait du fric. » Une épidémie plus un tordu qui a fabriqué des clones d’Adèle bombes vivantes, bien avant la vague terroriste et la Covid, Tardi a dû rebattre ses cartes et adapter le tout pour ne pas être taxé bêtement d’opportunisme avec le tome 10. Tardi sculpte ses dialogues, lance des piques, trouve toujours la solution à ses incursions fantastiques. Un monstre par album, c’est sa devise. Mais d’où viendra le salut ? Suspense oblige, on se tait.
Ce bébé enlevé va donner des réponses, montrer que tout est un éternel recommencement. Le dessin a cette puissance évocatrice inégalée associée au talent d’un conteur inspiré. Tardi va-t-il regretter Adèle ? : « Ce n’est pas exclu. Je ne veux pas qu’un faussaire quelconque fasse la suite. » Pour la première fois dans sa vie d’auteur, Tardi n’a pas de projets en vue, quelques idées sans plus. Quand on lit son Bébé des Buttes-Chaumont qui boucle génialement la boucle on se dit que ce n’est que provisoire, bien sûr.
Adèle Blanc-Sec, Tome 10, Le Bébé des Buttes-Chaumont, Casterman, 14,50 €
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