Un petit bijou ces Chimères de Vénus, à la fois fantasque, fantaisiste, à l’humour cinglant et qui envoie des pointes sèches mine de rien contre les grandes périodes coloniales, France et Angleterre réunies. Les Chimères de Vénus sont on le sait une très astucieuse digression qui s’appuie sur Le Château des Étoiles d’Alex Alice. Vénus planète lointaine colonisée, une belle blonde Hélène qui chante Hoffenbach et recherche son amant bagnard, sa suivante de choc, Chouvigny copain de l’Empereur et le général Mercadet qui ne fait pas dans la dentelle sans oublier un médium à sale tête et des créatures palmées, les aventures vont faire appel à Verne, Jacobs et d’autres. Alain Ayroles et Étienne Jung au dessin ont réalisé un superbe travail de découpage, de mise en page, de documentation, de reconstitution pimentée de Cochinchine et de 20 000 lieues sous les mers, avec ajouts judicieux, dont un clin d’œil à Pagnol pour son capitaine Escartefigue dans Marius.
Une colonne de tricornes et des tirailleurs tonkinois, des Zouaves, on progresse dans la jungle. La belle Hélène n’a qu’une idée en tête, son amant Aurélien qui s’est fait la belle et erre avec un copain forçat entouré par des Sargasses, curieuses créatures locales. A Nouvelle Cythère on se croirait sous le Second Empire, Deauville, Le Touquet. Avec drôles de bestiaux en prime. Il faudrait aller au Fort Saintes-Maries pour avoir des nouvelles d’Aurélien. Hélène va charmer le gouverneur Chauvigny d’autant que Sar Pélardon médium sait qu’il est vivant. A moins qu’il ne joue le jeu de Chauvigny pour séduire Hélène. Aurélien est aidé par les Sargasses. Un nouveau sous-marin qui marche à l’éthérite va prendre la mer. D’autant que l’Angleterre et la France se disputent pour des morceaux de terre que la perfide Albion veut rattacher à sa colonie. Sur le petit ferry boat du capitaine Barbassou, Hélène réussit à le détourner et file vers Fort Saintes-Maries malgré les monstres marins qui hantent les eaux.
Il va y avoir des surprises très anglaises, des scaphandriers en tenue rouge et casque colonial, des alliances, un château mystérieux et un coup de crayon qui passe de Cendrillon à La Belle au bois dormant, en un mot du Disney superbement revisité. Car hormis l’histoire décapante, enflammée il y a le dessin de Jung qui fait merveille dans ce conte édifiant et envoûtant, charmant qui fait du bien à l’imaginaire.
Les Chimères de Vénus, Tome 2, Rue de Sèvres, 15 €
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