Interviews

Fantax le retour d’un classique avec Jean Depelley, Jean-Michel Arroyo, Paskal Millet et Thierry Mornet

Il a été un des personnages phare de la fin des années 40 à 50. Fantax c’est un super-héros avant la lettre, masqué, musclé bien français de conception, crée par en 1946 par le scénariste J. K. Melwyn-Nash (Marcel Navarro) et par le dessinateur Chott (Pierre Mouchot, également éditeur de la série). Fantax est de retour. Deux de ses aventures sortiront à l’occasion du Festival d’Angoulême 2025. Pour le premier album, Espions sur la Tamise (au demeurant sauf erreur titre d’un film de Lang), ce sont au scénario Jean Depelley et au dessin Jean-Michel Arroyo qui ont répondu aux questions de Ligne Claire sur ce retour inattendu. Le second est signé par Paskal Millet et Thierry Mornet. Les deux albums sont édités par « Connaître Chott ». Propos recueillis par JL TRUC.

Jean Depelley, vous êtes un spécialiste du comics, un scénariste, un journaliste et un enseignant. Pourquoi vous êtes vous embarqué dans l’aventure Fantax, précurseur des super-héros internationaux. Fantax est lui bien français. Vous avez eu envie de relancer ses aventures épiques ?

Je suis aussi historien de la BD et j’écris des articles, des livres. Je me suis intéressé à un auteur français des années 40, Pierre Mouchot moins connu aujourd’hui dont j’ai pu récupérer une collection des œuvres, la lire. Mouchot avait dessinée Fantax. Cela correspondait au moment où le petit-fils de Mouchot, Tanguy rééditait les albums de son grand-père. Il n’avait pas tout, j’ai fait des scans et des textes pour cette réédition. 6 tomes sont parus édités par Connaître Chott (pseudo de Mouchot). Il a eu l’idée de créer un nouvel album Fantax Renaissance et a demandé à des auteurs de travailler sur de nouvelles histoires courtes. Je me suis retrouvé bien plus tard à écrire une histoire avec Jean-Michel Arroyo.

Quand vous avec décidé de vous lancer dans l’aventure, Arroyo était déjà concerné ?

L’album dont je vous parlais a une dizaine d’années. Tanguy m’avait demandé si je voulais travailler sur le sujet et avec qui. J‘ai cité Arnon et Arroyo. Tanguy était fan d’Arroyo et cette petite histoire est sortie il y a dix ans. Fantax Renaissance était un recueil d’histoires courtes avec entre autres Mitton, Corteggiani. Pour les deux albums à venir, Millet signe un autre Fantax avec Mornet qui sortira avec le nôtre pour Angoulême.

Là on aura donc deux one-shot indépendants.

Ce n’est que l’an dernier que Tanguy Mouchot m’a contacté. J’avais travaillé sur la censure et la loi de 49 pour un film où on évoquait Fantax. Il y avait eu à Nice une exposition sur l’œuvre de Mouchot. Au Futuroscope il y a eu une attraction avec le personnage de Fantax qui apparaît. Il y a aussi un projet de film et c’est dans ce contexte que Tanguy Mouchot ressort cette nouvelle collection d’albums classiques, celui de Paskal Millet et Thierry Mornet, et le mien avec Arroyo.

Fantax dans Espions sur la Tamise. J.M. Arroyo ®

Pour relancer une série comme Fantax, il y a un lectorat ? C’est très vintage.

Fantax va faire appel à deux sources. Le comics Golden Age mais à travers le prisme français. Donc il faut traiter ça de façon décalée, Fantax a un style de catcheur de la grande époque. On est dans les années 50 et on le voulait. Le deuxième élément, c’est le contexte de la guerre Froide de l’époque. A la Blake et Mortimer, Edgar Wallace.

Américains contre Soviétiques, c’est de l’espionnage ?

Oui digne de la collection Fleuve Noir de l’époque avec un trait d’Arroyo digne du dessin de Gourdon. Avec des avions en prime dont un Russe.

Il vous semble possible que Fantax redevienne une série ?

On en a parlé avec l’éditeur. Il faut attendre selon ce que donneront les ventes mais pourquoi pas. On a repris le ton du polar, c’est une nouvelle expérience narrative pour Arroyo, de rendu avec des expressions de ses personnages plus fortes. Et la couleur directe en prime. On est sur un format album comics en 51 pages. Le contexte permettait de faire une belle histoire autour des débuts de la bombe atomique anglaise en 1949.

Ambiance rétro. J.M. Arroyo ®
Pierre Mouchot alias Chott Place Carnot en 1960. Jean Depelley ®

C’est un projet sympa et amusant ?

Le plaisir avant tout. Cela me permettait de faire un scénario agréable, travailler avec un ami. Je suis enseignant en fait. Il a fallu écrire vite et je pense qu’on a bien réussi notre histoire.

Fantax c’est un peu Batman. Un personnage riche et célèbre qui se masque pour défendre le pays.

Oui il est Lord. Son adversaire c’est Al Cappy, la maffia dans les albums du début et l’espionnage. Il y a eu une première série de 39 titres, puis des romans de gare illustrés, dans les années 50 il y aura six nouveaux numéros petits formats. Mais tout ce qui avait un côté US en BD était mal vu par la commission de censure à cette époque.

Et vous Jean-Michel Arroyo, comment avez-vous rejoint Fantax ?

Jean Depelley a dû vous dire que c’est Pierre Mouchot qui a créé Fantax, qui finira par en être scénariste et dessinateur. Tanguy Mouchot a eu l’idée de reprendre Fantax personnage de son grand-père. Il a ressorti le fond, a eu du succès et a voulu faire de nouvelles aventures. Il a initié donc deux albums d’une cinquantaine de pages qui vont paraître pour Angoulême 2025. Le nôtre avec Depelley c’est Espions sur la Tamise. Jean Depelley m’a proposé de m’écrire une histoire qu’il a proposé à Tanguy qui l’a acceptée. Jean a écrit le scénario complet. C’était un nouveau style pour moi. J’ai commencé par du lavis et puis je suis passé à la couleur.

C’est un héros avant les super-héros.

Fantax travaille pour les Anglais, il va avoir des soucis et a un petit côté Fantômas. Jean s’est bien débrouillé. On aimerait bien en faire un autre. J’ai travaillé très vite, avec un rythme très régulier. On est en Russie, en Angleterre. Il y a eu un travail de recherches comme pour un centre de recherche atomique en Angleterre. Il y avait graphiquement de quoi faire, de l’urbain, des décors naturels.

Vous avez travaillé de quelle façon ?

J’ai travaillé en traditionnel et en couleurs directes sur les pages. J’ai abordé le sujet de façon très franco-belge. Jean m’a permis d’avoir un droit de regard sur son écriture et je l’en remercie. Cela s’est bien passé entre nous. Un vrai travail d’équipe amical. Je l’avais rencontré à l’époque à Limoges. On est vraiment avec ce Fantax dans le contexte de la Guerre Froide avec des bases secrètes, très années 50.

Des couvertures originales des années 40. Jean Depelley ®

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