Un Fauve d’Or pour une fois dans une vraie logique. Révolution T1 a obtenu le Fauve d’Or de l’édition 2020 du festival d’Angoulême. Un album souvent cité en tête des nominés de nombreux prix (dont le Prix Cases d’Histoire) est consacré, un album tout public et qui répond, osera-t-on dire enfin, aux attentes que l’on peut avoir pour le Fauve d’Or. Florent Grouazel et Younn Locard sont les auteurs de cette fresque révolutionnaire, c’est le cas de le dire, prévues en trois tomes et publiée par Actes Sud L’An 2.
Reste que pour les autres prix, vous avez le bonjour d’Alfred. Pas certain, mais alors pas du tout, que beaucoup les ait lus. En espérant que ces prix généreusement attribués en seront l’occasion. Donc rebelote et der de der, pour le côte grand public, on repassera. Heureusement que les libraires ont récompensé les Indes Fourbes. Pas un éditeur disons lourd, hormis Delcourt, au palmarès. Pas de Blueberry (on s’en doutait un peu), pas de Loup, pas de Préférence Système. En polar pas dans la Tête de Sherlock Holmes. Allez, on ferme et on passe à autre chose avec un bravo bien mérité cependant à Révolution T1.
Mais cette remise des prix c’est aussi la contestation des auteurs en direct et qui revendiquent que leur statut soit enfin revu, corrigé, reconnu, que les éditeurs se soucient vraiment d’eux et ne les traitent plus comme des marchandises périssables avec date de péremption et salaires à la baisse. On espère que dans ce cas qu’ils ont été entendus et que les faits le prouveront en 2020. J-L. T.
La cérémonie de remise des prix, en présence du ministre de la Culture Franck Riester, a eu lieu au théâtre d’Angoulême :
Prix Spécial du Jury, Clyde Fans de Seth (Delcourt). Fruit d’un travail commencé voilà vingt ans, Clyde Fans raconte l’histoire de deux frères qui ont hérité de l’entreprise de leur père après que celui-ci les a abandonnés. Le Canadien Seth, dont le graphisme tout en élégance est empreint d’une petite pointe de nostalgie, n’a pas son pareil pour raconter des histoires intimes qui touchent à l’universel de la condition humaine.
Prix de la Série, Dans l’Abime du temps de Gou Anabe (Éditeur Ki-Oon). Après Les Montagnes hallucinées, Gou Tanabe poursuit son adaptation des romans du maître de l’horreur, H.P. Lovecraft. Quittant l’Antarctique pour le désert australien, d’un trait noir au réalisme oppressant, le mangaka dessine l’indicible et donne corps à ce chef-d’œuvre SF cauchemardesque qui combine un voyage dans le temps et un terrifiant transfert de personnalité.
Prix Révélation, Lucarne de Joe Kessler (L’Association). Ces cinq histoires courtes imprégnées de couleurs fortes traduisent les sensations les plus intimes des personnages. Une expérience graphique et narrative singulière, signée par le directeur artistique de l’éditeur anglais Breakdown Press, pour dire la peur, le plaisir ou les odeurs, soutenue par une narration hypnotique et une vision originale du monde.
Prix de l’Audace, Acte de Dieu de Giacomo Anni (Ici Même). Le 24 août 2016, en Italie, un séisme causait la mort de 298 personnes et faisait près de 400 blessés. Giacomo Nanni piège l’instant dans un récit choral qui fait parler la montagne, s’attarde sur un chevreuil égaré devant un supermarché et traque la licorne dans le viseur de deux chasseurs. Son ode panthéiste confronte l’homme à la nature et la création au chaos, dans un magma graphique pointilliste et médusant.
Prix du Patrimoine, La Main verte et autres récits de Nicole Claveloux et Edith Zha (Cornélius). Premier volume d’une anthologie consacrée à Nicole Claveloux, peintre, illustratrice jeunesse et dessinatrice de bande dessinée, passée par les magazines Métal hurlant et Ah! Nana. Recueil d’histoires poétiques rehaussées de couleurs flamboyantes, La Main verte décrit un monde absurde et drôle dans lequel la réalité joue à cache-cache avec la raison.
Prix du public France Télévisions, Saison des roses de Chloé Wars dessinatrice et scénariste (éditions FLBLB). Barbara passe le bac. Elle habite avec sa mère dans la banlieue ordinaire de Rosigny-sous-Bois et ne vit que pour son club de football. Mais cette année, les dirigeants ont décidé de favoriser l’équipe masculine, empêchant l’inscription des joueuses au championnat. Avec ses feutres, Chloé Wary met ses couleurs vives au service du récit, pour saluer l’engagement de l’équipe sur le terrain collectif du foot et de la lutte féministe.
Fauve Polar SNCF, No Direction d’Emmanuel Moynot (Sarbacane). Dans ce road movie de papier en forme de récit choral, Moynot suit deux tueurs en série dans leur course folle à travers l’Amérique, à la manière d’un cinéaste filmant caméra à l’épaule. Épopée sanglante et sans espoir, vouée à l’échec et à la violence, No Direction est une comédie humaine en vingt chapitres qui cueillent le lecteur à l’estomac comme autant de coups de poing.
Prix Jeunesse, Les Vermeilles de Camille Jourdy, (Actes Sud). Jo s’ennuie en camping avec sa famille et vagabonde dans la forêt. Elle y rencontre de beaux poneys colorés, les Vermeilles, et un petit peuple merveilleux qui part en guerre contre un matou tyrannique. Avec ses aquarelles subtiles, Camille Jourdy déroule un conte à la fois doux, absurde, inquiétant et lumineux, parsemé de clins d’œil à Alice et Peter Pan.
Prix de la BD alternative, Komikaze d’Ivana Armanini (Croatie).
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