Il voulait absolument le signer cet album, Ptiluc. Dans la collection La Véritable histoire vraie, il avait déjà mis en images un Hitler décapant. Et dans une interview annonçait que Staline, son alter ego, ne pouvait être que la suite de sa participation à cette collection qui a su à merveille montrer le tragique absolu, l’horreur totale à travers un prisme dont l’humour noir n’est pas absent sur un fond totalement historique. Un sacré tour de force aussi du directeur éditorial et scénariste Bernard Swysen. Comme on l’a déjà dit, cette fois encore, on ne peut que penser à Calvo pour La Bête est morte mais qui se limitait à la seconde guerre mondiale, sans biographies, en classant les pays par types d’animaux. Staline, Ptiluc l’avait annoncé, serait un ours, l’ours soviétique, un homme qui restera comme l’un des plus terrifiants et sauvages dictateurs du XXe siècle. On a eu tendance à l’encenser en particulier en France même encore au moment de sa mort en 1953, intellectuels et parti communiste français plus affiliés aux ordres. C’est d’URSS que viendra la déstanilisation certes limitée mais qui finira par une Perestroïka incontournable et l’éclatement du bloc soviétique. De quoi faire retourner Staline dans sa tombe, tant mieux.
Il est né en Géorgie à la fin du XIXe siècle. Iossif Djougachvili n’est par encore Josef Staline (son nom de guerre) mais il part du bon pied pour le devenir. Il attrape la variole et se prépare à être prêtre. Son père le bat et il commence à avoir adolescent des certitudes politiques dans un pays écrasé par le pouvoir. Nicolas II devient tsar. Joseph étudie au séminaire, devient socialiste. A Munich un certain Lénine se lance en 1901 en politique. Joseph arpente les prisons russes et se crée des relations. Il comprend vite que diviser c’est mieux régner. En 1905 l’armée tire sur la foule à Saint-Pétersbourg. Lénine s’agite à l’étranger, Trotski en Russie. Staline assiste à un meeting de Lénine et est subjugué par ses idées, pas par le personnage. Il braque des banques, a un fils. La révolution est en marche mais il retourne en prison.
La suite c’est 1917, puis la prise de pouvoir à la mort de Lénine qui ne voulait pas de lui comme successeur. Il n’aura aucun état d’âme et des complices de haut vol mais qu’ils sacrifiera si besoin. Beria sera son bras armé. Purges sanglantes, déportations, il monte ses rivaux les uns contre les autres pour mieux qu’ils se détruisent. Arrivera la montée du nazisme en Allemagne, la guerre d’Espagne, le pacte germano-soviétique qui imposera aux PC frères de ne pas bouger contre l’Allemagne. En 1941, l’armée soviétique, désorganisée car il l’a épurée, craque face aux troupes allemandes. La suite, on la connait. Berlin tombera. Staline fera main basse sur une partie de l’Europe, laissera les nazis anéantir la résistance polonaise à Varsovie. Et continuera ses meurtres en série avec des victimes qui se compteront en millions. Reste aussi un diplomate brusque mais intelligent que seul Churchill avait percé à jour. Roosevelt aurait pu laisser foncer les troupes US vers Berlin en 1945, avant les Russes car les Allemands leur auraient ouvert la voie. Mais Roosevelt n’a pas osé. Ptiluc a vraiment pris la main avec brio et justesse de trait, de ton sur ce Staline dont rien n’échappe dans une vie qui ne sera qu’une longue marche sanglante. Un album qui permet de remettre les pendules à l’heure de façon intelligente et imagée.
La Véritable histoire vraie, Staline, Dupuis, 20,95 €
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