Pour qui habite en Languedoc, y est né, les Révoltes vigneronnes font partie de l’Histoire locale mais aussi nationale même si, de nos jours, le souvenir s’est un peu estompé. On se souvient aussi des crises viticoles du début des années 70, plus proches, du drame de Montredon où CRS et viticulteurs eurent à déplorer un mort dans chaque camp. Le Languedoc et le Roussillon ont, de tout temps, étaient des terres à vin. Depuis les Romains mais, au début du siècle, le XXe, la France c’était aussi l’Algérie, non moins producteur de vin. De là à ce que des magouilles se mettent en place et créent des tensions puis une révolte sans précédent en 1907, c’est ce que raconte Eric Corbeyran au scénario, Lucien Rollin au dessin, que l’on retrouve avec plaisir, dans Vinifera, la grande histoire de la vigne et du vin.
1900 à Sète, port de transit des marchandises venues d’Algérie. On y débarque du vin qui part à Bercy. chez le négociant Mauvoisin. Qui va le vendre comme étant du Bordeaux. Dans un petit village du Languedoc, un jeune garçon, Gaston, ne rêve que d’aller aider son père à la vigne. Un métier dur, ingrat qui permet juste de survivre. On produit trop en Languedoc et pas que du bon vin. Il se vend mal. Le père de Gaston veut que la loi punisse les trafiquants qui font des cocktails improbables pour mieux vendre, qu’on créé un comité de défense viticole, qu’on alerte Clemenceau. En juin 1907, une grande manifestation est prévue à Narbonne. Le maire est arrêté ce qui provoque la colère des viticulteurs, la troupe tire. Le père de Gaston est blessé et meurt peu après. Le leader, Marcellin Albert, est discrédité par Clemenceau. A Agde, des régiments ont levé leurs crosses. Mais l’ordre est revenu. Gaston voit sa mère, Rose, obligée de vendre leur propriété viticole et résister aux avances de Mauvoisin. La famille finir par partir à Paris et Rose accepte les conditions de Mauvoisin.
Une histoire romanesque qui s’appuie sur la réalité des révoltes vigneronnes, d’une crise qui n’en finit pas encore qu’en quarante ans, le Languedoc et le Roussillon aient su se remettre en question pour enfin jouer dans la cour des grandes appellations. Gaston sera le témoin de ces évolutions dans cet album très précis sur les grandes étapes qu’elles ont connues. Les lois vont se succéder mais pas vraiment arranger les choses. On magouille encore, les rendements à l’hectare explosent. Mais on finira par reconnaître les terroirs, les appellations d’origine. Reste que la vigne n’est jamais sortie d’affaire. En Languedoc, si la qualité est de mise aujourd’hui, le climat qui s’emballe produit des vins de plus en ensoleillés, riches en alcool. Alors que les consommateurs, qui diminuent, veulent des vins plus souples, moins chargés. Que faire ? La vigne et les hommes qui la font sont de nouveau dans l’œil du cyclone. Un très bon dossier sur 1907 à la fin de l’album.
Vinifera, La Grande Histoire de la vigne et du vin, Les Révoltes vigneronnes, Glénat, 14,50 €
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