Les Guerres Silencieuses est un album trait d’union au cœur même de l’histoire de l’Espagne franquiste, celle du Caudillo, bien après la guerre civile. Le Maroc espagnol issu d’une vente bizarre entre un sultan et le roi en 1860 restera dans la gibecière de l’Espagne moderne. Il y aura la guerre au milieu des années cinquante. L’Espagne quittera le Sahara en 1975. Elle minimisera le conflit qui aura son lot de victimes et continuera à y envoyer des troupes.
On peut être à la fois auteur de BD et pas inspiré. De quoi se plonger dans la saga familiale. C’est ce que va faire le personnage autobiographique de Jaime Martín qui raconte au jour le jour le service militaire de son père. Il est envoyé à Ifni au moment où une rébellion est menée par le Maroc qui veut récupérer le Sahara espagnol. Trois ans au programme avec risque de rallonges, de quoi faire voir des renards à toute une génération, celle du franquisme victorieux des années cinquante dans une Espagne sous dictature.
En 1955 l’Espagne remonte doucement la pente d’une économie à la dérive. Pepico est enfant. Il aime déjà Encarnita qui deviendra plus tard sa femme et la mère du narrateur. En Espagne on mène une mini-guerre aux frontières lointaines. C’est l’époque de la guerre d’Algérie pour la France. Une échelle différente mais proche de celle que mène l’Espagne contre le Maroc au Sahara. Pepico en 1962 est bon pour le service, un voyage en bateau et un qui ne fait pas dans l’affectif.
Avec une grande précision, une authenticité de chaque instant, Jaime Martín endosse l’uniforme de son père qui lui confie ses souvenirs. De la camaraderie, de la débrouille, de la haine, de la violence gratuite, de la bêtise et la guerre en toile de fond, une guerre qui se cherche et ne dit pas son nom, des gamins déboussolés qui en garderont à jamais des traces.
Une histoire d’hommes, un récit humain, un témoignage, de la tendresse, Jaime Martín au trait clair, réaliste, sans surcharge (Ce que le vent apporte, Toute la poussière du chemin) a signé un album important. Il ne juge pas. Il constate la jeunesse perdue d’une génération pour rien qui était à la merci écrasante du totalitarisme franquiste. Le rappel que fait Martín était nécessaire.
Les Guerres silencieuses, Dupuis, 24 €
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