Ed Brubaker et Sean Phillips sont deux complices qui savent mieux que quiconque créer des univers sans pitié et étonnants. Avec Criminal, ils ont mis en place un monde où le suspense est roi, comme les coups de théâtre pour le moins inattendus. Avec cet album, Mes héros ont toujours été des junkies, on reste dans Criminal mais dans une sorte de parenthèse indépendante, un one-shot qui reprend toutes les règles de la série mère. Un centre de désintoxication, une belle blonde un peu frappée et un mec pas mal dans le genre qui tente de décrocher. Il y a des fois des destins qui feraient mieux de ne pas se croiser. Redoutablement efficace.
Ellie est folle de musique, et en particulier de celle écrite par des vedettes défoncées. C’est pour elle une sorte de qualité de créativité d’exception. Ses héros sont des junkies. Sauf qu’Ellie est, elle-aussi, complètement accro. Dans le centre huppé où on la soigne, elle est entourée de cas divers et variés. Il y a l’obsédé par la mort, un menteur qui fait croire qu’il est junkie mais dépense son fric dans des boites, Ken c’est la coke. Il a aussi le beau Skip qui a flashé sur Ellie mise dans la clinique aux frais de son oncle. Sa seule chance à Ellie de s’en sortir qui va quand même déraper en se rapprochant de Skip. Il semble suivi de près mais reste mystérieux le garçon. Son père serait un escroc. Reste que partir en balade avec Ellie, il n’a rien contre Skip. Comme non plus rien contre cambrioler ou squatter des villas pendant leur cavale pour se marrer un peu avec la belle.
Des histoires de familles, de drogue, d’entourloupes. Suspense garanti, dessin de Phillips bien dans le ton, en nuances le tout. On est accro, c’est le cas de le dire, au machiavélisme de Brubaker. Mine de rien, il jette l’appât et, crac, il ferre. Du grand art, pour le plaisir d’un polar bien ficelé, noir à souhait.
Criminal, Hors-série, Mes héros ont toujours été des junkies, Delcourt, 12 €
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