Depuis Réalités et Mondes obliques, Clarke nous embarquait dans des courts voyages angoissants. Il y revient avec Rencontres obliques, autres histoires en quelques pages, parfois scénarisées par Vehlmann, Zidrou, Cauvin, Safieddine, De Jongh, Dugomier, Foerster, Toussaint ou Andréas. Du beau monde, et un Clarke au mieux de sa forme avec un trait aussi noir que ses héros. Il ratisse large, du polar à l’horreur, au fantastique. Ses mondes, et ceux de ses scénaristes, n’aiment pas vraiment les vivants et préfèrent les morts en puissance. Frissons subtils, ou terreur froide, Clarke pousse les feux de ses angoisses et nous les communique.
L’arche de Noé revient par gros temps, et le voile de la mort obscurcit le regard des humains quand leur temps est venu. Louise sait le reconnaître chez les autres. Mais pourquoi tous les passagers de son avion ont-ils ce voile ? Sur sa table de dissection, il souffre le martyr, hurle sa souffrance. Une cicatrice en Y, c’est vrai, il est mort lui aussi. Tueur psychopathe, il voit sa nouvelle victime qui, elle, découvre en lui la sienne. Perdu et pas de joker. La religieuse se soumet mais le malin est en elle. A lui, au diable, de jouer et telle est prise qui croyait prendre. Gentil le chien que ses maîtres et la petite Fanny ont abandonné. Fidèle le toutou qui les retrouve mais pour mieux les manger, mon enfant. La peur du noir, absolu, la nuit qui tombe, qui gobe tout sur son passage. Un bloc de ténèbres. Une navette spatiale, un trou noir encore, un appel de détresse, un autre trou noir et tout se répète.
Un petit régal ces Rencontres obliques, qui flirtent parfois avec le surréalisme à la Bunuel. On est désorienté, séduit, étonné. Des scènes de vie extraordinaires que Clarke et ses comparses mettent en musique façon Te Deum, pas d’humour. Car on meurt pas mal avec eux. On se fait découper pour le plaisir, on se rebelle, on se prend un bilboquet sur le crâne. La mort imparable mais le souvenir qui persiste de soi chez les autres, Clarke s’interroge. Cauchemars, fantasmes, peurs, tout y passe et on suit le mouvement avec un plaisir inavouable sur un dessin toujours aussi fort.
Rencontres obliques, Le Lombard, 16,45 €
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