Quand on évoque le nom de Mozart, on pense au génie, au prodige un brin torturé, dans le veine du personnage du film de Forman, Amadeus. On sait moins que Mozart a fait halte à Paris en 1777, en rupture avec son mécène rigoureux de Salzbourg. Au total il a fait trois séjours en France. Il cherche gloire, argent et reconnaissance, flanqué de sa mère qui lui sert de conseiller officieux. C’est cette période assez trouble, dure que Frantz Duchazeau a mis en musique, si l’on peut dire, en détails et dans un environnement largement corrompu qui n’aime pas le petit génie. Duchazeau a tracé un portrait atypique de Mozart, seul face à son talent qui dérange et qui pourtant ne cessera de progresser.
En 1777 Mozart est viré par son maître d’archevêque. Un an plus tard il débarque à Paris, la foi chevillée au corps qu’il a menu et qui le fait passer pour un adolescent attardé. Il va jouer dans un salon et émerveille la duchesse de Castries qui le prend comme professeur. Il découvre les habitudes parisiennes, la taille de la ville et est persuadé qu’il est incontournable. Il joue chez la duchesse de façon éblouissante et rencontre Legros, directeur de salle. Lui connait Mozart et lui commande une symphonie. Comblé, Mozart rejoint sa mère dans le modeste logis qu’ils partagent. Sa mère regrette Salzbourg et lui montre une lettre de son père qui rêve d’une toute autre carrière pour son fils. Grimm est son contact officiel à Paris qui lui conseille de se montrer, être retors car la concurrence musicale est rude. Gluck et Piccinni sont les compositeurs vedettes du moment. Il refuse un poste d’organiste à Versailles et n’arrive pas à se plier aux contraintes parisiennes. Legros l’oblige à changer des passages de sa symphonie. Mozart se rebelle.
Mozart à Paris, c’est le génie face à la médiocrité, aux petits arrangements entre amis, ce que montre parfaitement Duchazeau qui a travaillé son sujet. Mozart est un homme libre, spontané, amoureux aussi et que la mort de sa mère va marquer à jamais. Frantz Duchazeau magnifie Mozart par des variations graphiques liées aux moments où il joue sa musique. Certes Mozart a un certain mépris pour les goûts musicaux français. Il sera trahi par Grimm. Le retour en Allemagne mettra un terme à cette bizarre aventure. Duchazeau signe un album à la fois enchanteur et parfois désespéré. On a de l’affection pour ce petit bonhomme au regard pétillant. Duchazeau a su avec tact donner un souffle exquis à son Mozart.
Mozart à Paris, Casterman, 18,95 €
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