Lors de la sortie de Une Sœur, Bastien Vivès s’était confié sur ses envies, sur son retour à des sujets plus personnels voire à pourquoi pas à un ouvrage carrément très osé. Ce sera, on y reviendra, Le Petit Paul chez Glénat. Avec Le Chemisier, on est à mi-chemin entre le fantasme et le réel, un mélange subtil qui fait croire à une histoire réaliste et fantastique, une aventure où un simple bout de tissus sera le déclencheur de passions, d’excès et surtout d’une sexualité retrouvée pour une jeune femme jusqu’alors simple, pour ne pas dire insignifiante. Bastien Vivès a écrit un roman dans lequel son personnage se réveille d’un long sommeil et plonge au plus profond d’une vie qui ne demande qu’à lui apporter des plaisirs jusqu’alors ignorés, refoulés. Une renaissance basée sur les images, le découpage des planches de Vivès. Une œuvre subtile, intelligente et immédiate.
Séverine a une vie rangée, prépare son agrégation de lettres modernes, a un copain Thomas insignifiant et, à l’occasion, fait du baby-sitting chez un couple qui bat de l’aile. Un soir où Séverine garde leur fille Eva, la gamine fait une indigestion et vomit salissant son tee-shirt. Tout juste de retour, mais sans sa femme, le père d’Eva prête un chemisier de son épouse à Séverine qui immédiatement ressent un trouble indéfinissable en le mettant. Séverine va voir ses parents et cherche par tous les moyens à rendre ce chemisier qu’elle va pourtant remettre pour passer un oral à la fac. Au denier moment elle s’aperçoit à la fois qu’elle n’a plus ses notes mais que tous, prof compris, ont les yeux rivés sur elle. A la sortie son prof l’invite à une conférence. Séverine resplendit et se découvre une nouvelle aura à la sensualité écrasante. Dès lors elle ne quitte plus son chemisier. Son prof lui avoue qu’il ne pense qu’à elle. Séverine aborde des hommes dans la rue et un soir monte sous la pluie dans la voiture d’Ali, un policier, qui subjugué l’amène dîner chez des amis avant de devenir son amant.
Sans son chemisier la nouvelle Séverine n’est plus que l’ombre d’elle même. Un chemisier catalyseur et symbole sexuel qui va lui permettre d’aller au bout de ses tentations, se révéler, prendre aussi des risques, ressentir le trouble de désirs inavoués et provoquer des situations équivoques. Vivès dessine deux Séverine, la première quelconque, la seconde transcendée par le chemisier, du visage au corps qui resplendit d’un coup. Des plans de films, une narration très fluide mais cadrée, ce Chemisier inclassable avec son attentat terroriste, s’ajoute au parcours toujours passionnant et passionné de Bastien Vivès, créateur d’univers qu’il est seul à pouvoir mettre en scène aussi bien.
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