Cigalon n’est pas une œuvre maîtresse de Pagnol. Film au départ puis pièce de théâtre cette joute oratoire écrite par Pagnol en 1935 sera un four total sur grand écran mais pas sur scène ni à la TV en 1975 jouée par Michel Galabru. Sa transcription en BD dans le cadre de la collection Marcel Pagnol chez Grand Angle lui redonne mine de rien une seconde jeunesse méritée. Sur des dessins d’Eric Hübsch toujours aussi ensoleillés et souriants (qui sera au festival de Fabrègues les 1 et 2 septembre 2018), les scénaristes Serge Scotto et Eric Stoffel ont su rendre tout le sel, la saveur, le velouté des dialogues. Ce qui pour cette histoire de rivalités de cuisiniers est bien le moins qu’ils pouvaient faire. Le soufflé monte et ne redescend pas dans ce Cigalon enchanteur qui sent toujours aussi bon la Provence, celle de Pagnol, Marius ou Escartefigue.
Un petit village provençal perché face à un paysage splendide, pour cette famille endimanchée il ne peut pas ne pas y avoir de restaurant avec une terrasse et un cuisinier accueillant. Ce qui est le cas au moins pour la terrasse et éventuellement pour des spécialités en conserve car pour le chef il existe bien mais Cigalon, c’est lui le chef, ne fait plus la cuisine que pour se nourrir avec sa sœur. Les clients il les méprisent et ne leur fera jamais plus goûter sa cuisine pourtant réputée dans son précédent établissement. Il a ouvert un restaurant où on ne mange pas Cigalon. Ras le bol des clients pour lesquels il passé sa vie en cuisine mais des petits plats il en parle comme du bon dieu. Sauf qu’il ne les fait pas. Le père de famille frustré va tout tenter, la psychologie en tête mais Cigalon est fort, très fort. Ses tripes il leur fait sentir et il se les garde. Mais quand son ancienne blanchisseuse à la ville, madame Toffi, vient lui dire bonjour et lui annoncer qu’elle va ouvrir un restaurant en face du sien, c’est pire qu’une déclaration de guerre mondiale. La grande catastrophe.
Une véritable et jolie comédie qui brille de tous les feux du texte de Pagnol plein d’humour. Eric Hübsch a désormais après Topaze une parfaite maîtrise des ambiances et du ton qu’il communique à son dessin. On déguste les mots de cette sympathique histoire de combat culinaire qui passe aussi par une tentative de grivèlerie amusante qui apportera indirectement la solution à cet imbroglio léger. Un vrai moment de bonheur simple.
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