Un récit où le dessin supplante peut-être l’écrit tant Guillaume Sorel sait jeter sur le papier des personnages et des ambiances d’une rare beauté nostalgique et éblouissante. Avec Bluebells Wood il signe en totalité une balade imaginaire, ou pas, fantastique, à coup sûr, un délire amoureux passionné. Le triste William va-t-il pouvoir résister tel Ulysse au chant des sirènes ? Où est la réalité et où commence le rêve qui pourrait bien se transformer en cauchemar ? Sorel excelle dans le style et ses couleurs directes fascinent.
Au pied d’une falaise où tombe parfois du gibier égaré, William a sa maison au bord de l’eau. Il jette à la mer la carcasse d’un chevreuil qui va faire des heureux mais pas ceux prévus. Son ami Victor s’étonne de cette manne tombée du ciel et voudrait bien que William, peintre de talent, passe le cap difficile d’un deuil qui l’obsède, celui de sa femme. Seule son modèle, la jolie et pétillante Rosalie vient le voir pour des tableaux qui ne lui ressemblent pas. Un jour où il peint sur son bateau, il est attaqué par des sirènes et tombe à l’eau. Il se retrouve sur la plage avec l’une d’elles qui, semble-t-il, l’a sauvé de ses sœurs qui tentent de la reprendre. William repousse les monstres et ramène la belle inconsciente chez lui, dans sa baignoire. Au matin elle a disparu. Victor qui est passé le voir lui rappelle que Héléna sa femme n’est plus là et que la dessiner en continu n’apporte rien. Dans les bois William rencontre une femme nue.
Il ne faut pas voir ou chercher une vraie logique à cette histoire. Encore que. William et son fantôme auquel s’ajoute son modèle et sa sirène accepte, on le lui dit, l’extraordinaire. Tout est là. On se laisser bercer par ce conte au parfum de dame en noir. Le renard n’est pas celui de Saint-Ex. Un monde sauvage dans lequel William voudrait vivre au présent. Une tragédie en fait que signe Guillaume Sorel qui a déchainé les puissances les plus violentes. Avec coup de théâtre à l’appui. Un seul mot, superbe.
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