Une Turquie qui a été le leader de la laïcité, du droit des femmes, de l’indépendance nationale, de l’instruction pour tous, une Turquie libre, c’était celle de Mustafa Kemal, celle d’Atatürk. On l’a oublié aujourd’hui, même pas pudiquement. La Turquie d’Erdogan, ce n’est pas celle d’Atatürk. Dans Le Père Turc de Loulou Dédola (Jeu d’ombres) et Lelio Bonaccorso au dessin c’est à la recherche de cette Turquie non pas perdue mais séquestrée que l’on part. Avec une femme en fin de vie qui veut à tout prix que son petit-neveu de 15 ans ne succombe pas au radicalisme religieux. Un combat intelligent car basé sur la grande histoire du peuple turc et du charismatique fondateur de sa république. Sortie le 21 mars.
Afife est une intellectuelle turque qui vit à Izmir. Elle est la maîtresse d’un homme marié depuis presque trente ans. Elle en a marre car les amants ne vieillissent pas ensemble. C’est le privilège des épouses et elle est gravement malade. Elle n’a plus que quelques mois à vivre. Afife retrouve chez sa cousine en France dans une banlieue, son petit-neveu Mehmet qui a 15 ans. Afife commence à lui parler de Kemal, le leader laïque turc. Le jeune garçon rétorque que les Turcs sont musulmans. Mustafa est devenu Kemal quand son nom de Mustafa à l’école des cadets de l’armée a été changé pour ne pas être le même que son prénom. Pré-délinquant Mehmet est en train de se radicaliser et Afife le suit à la mosquée. Elle comprend qu’il faut le sortir de là et lui propose de rentrer en Turquie avec elle pour un job d’assistant, prendre des photos, le tout pour un ouvrage sur la vie de Mustafa Kemal qui deviendra Atatürk. De sa jeunesse à sa volonté de renverser le sultan, à la guerre de 14 pourtant du côté allemand, Afife raconte sa vie au jeune homme tout en ayant du mal à résister au mal qui la ronge. Elle mène un combat sur deux fronts, le sien et celui de Mehmet à qui elle veut montrer ses vrais racines à travers le personnage d’Atatürk qui sera le fondateur de la république laïque.
Avec Atatürk ce sera non seulement la fin de l’empire ottoman mais aussi une ouverture vers un monde moderne avec des avancées souvent plus précoces que dans bien des pays civilisés. Les droits de la femme en Turquie en seront un exemple. Et la laïcité un devoir. Avec Afife on a un très beau portrait de femme courageuse qui va tout sacrifier par conviction. Une résistante qui ira au bout de son combat et va le gagner. Une part certes romanesque avec un rappel nécessaire de ce qu’a été la Turquie et qui doit le revenir, un hommage aussi à celles et à ceux qui se battent pour cet objectif et dont Mustafa Kemal Atatürk reste le modèle, le père en quelque sorte, signification du titre. Un album coup de poing, nécessaire et porteur d’espoir.
Le Père Turc, À la recherche de Mustafa Kemal, Glénat, 22,50 €
Et Atatürk, le dictateur, nationaliste, raciste.. On en parle quand ?? Demandons aux Kurdes, tiens !! Arrêté avec ce genre de personnages..
De la propagande qui fait silence sur les zones d’ombre de Mustafa Kemal. Rêver que les Turcs reviennent à Kémal ? Qu’ils aient à nouveau un père ? Et pourquoi pas rêver qu’ils deviennent adultes au lieu de chercher un père ? Cette notion même de père est choquante. Dommage. Au fait, quand il a instauré le droit de vote des femmes, pendant des années la Turquie n’avait qu’un parti unique. Mais bon, un détail sans doute pour Glénat.