La Guerre d’Espagne, une guerre civile sans précédent, est restée à jamais gravée dans la (mauvaise) conscience des démocraties. En 1936 la République espagnole démocratiquement en place sera attaquée de front par l’armée de Franco qui voulait instaurer un régime dictatorial. Alors qu’en France c’est le Front Populaire de gauche qui est au pouvoir, on se contentera d’envois d’armes parcimonieux alors que l’Allemagne d’Hitler donne à Franco une escadrille, la Légion Condor, des armes lourdes aidée par l’Italie fasciste de Mussolini. Seules les Brigades Internationales de volontaires étrangers dont Malraux sauveront l’honneur avant la fuite en France des derniers Républicains en 1939. Qui se retrouveront parqués dans les camps de Rivesaltes ou plus tard livrés pour certains aux nazis.
Carlos Giménez s’est fait le témoin au quotidien de la vie de population de Madrid de 1936 à 1939. C’est le peuple que Giménez montre dans ce nouvel album qui fait suite à Paracuellos. Sous le feu des bombes allemandes, des canons franquistes, des règlements internes entre anarchistes, socialistes, républicains qui fusillent, les familles tentent de survivre. Comme bientôt les familles françaises sous l’occupation allemande. Une guerre atroce contrairement, comme le dit Giménez en préambule, à l’idée reçue qu’elle était romantique.
Les enfants meurent de faim, de maladie. On dénonce à tour de bras.Les prêtres sont fusillés par les « rouges ». Marcelino et sa famille sont les principaux acteurs de ces trois ans d’horreur. Républicain, Marcelino aidera sa riche patronne à sauver son fils. Et par tous les moyens avec sa femme préservera ses enfants, témoins de plus en plus conscient que la guerre n’est pas un jeu. Pris au piège dans Madrid encerclée, la population va souffrir le martyre sans espoir. Jusqu’à l’entrée des troupes franquistes et la fin de la République. Ce seront ensuite d’autres terreurs.
Giménez ne raconte pas l’histoire de la guerre d’Espagne. A la fin de l’album Phil Casoar en donne tous les détails avec le déroulé complet de la bataille de Madrid. Il y a une profonde émotion dans le récit de Giménez dont le dessin en noir et blanc, précis, appuyé apporte sa force à des situations dramatiques. Giménez comme il le dit lui-même a essayé de rester neutre. Impossible il a tenté alors d’être objectif. Son recueil a désormais pris sa place dans cette histoire sanglante qui ne verra sa fin qu’en 1975 et la mort de Franco.
Les Temps mauvais, Madrid 1936-1939, Fluide Glacial, 35 €
Articles similaires