Deux obsédés de l’honneur façon découpage au sabre, deux officiers d’Empire liés à jamais pour le meilleur et pour pire, deux têtes de mule qui non content de ne pas se faire tuer de Iéna à Waterloo n’auront de cesse d’y réussir en s’affrontant en corps à corps. Et donc en Duel bien sûr, titre de ce vibrant roman graphique picaresque, historique, épique, sanglant que signe de traits énergiques tant au scénario qu’au dessin Renaud Farace. Il y a de la fougue dans ces deux obstinés, le premier taiseux, le second impétueux. C’est une nouvelle de Joseph Conrad qui a donné vie à ce Duel qui ne laisse pas un instant de répit aux lecteurs comme aux deux héros qui ne peuvent ni mourir ni vivre l’un sans l’autre. Un dessin endiablé en noir et blanc, sauvage et impressionnant.
Le lieutenant Féraud est un batailleur, un duelliste, un querelleur, un hussard au courage bien connu. Le lieutenant Armand d’Hubert hussard lui-aussi aurait pu être britannique par son flegme si il n’était dans la Grande Armée comme Féraud qu’on lui demande d’aller empêcher de se battre une fois encore en duel. Ses supérieurs dont l’Empereur entre autres. Il va avoir le tort de récupérer Féraud chez une dame fort obligeante. Ce qui va déplaire à ce dernier qui va en demander réparation à D’Hubert. Premier combat, premier sang, avantage à D’Hubert mais Féraud n’est pas d’accord. Désormais ce ne sera que duels et affrontements entre les deux hommes sur fond de campagnes napoléoniennes. D’Hubert monte en grade, Féraud multiplie les exploits et Napoléon le nomme capitaine. Tout ce que l’un fait, l’autre aussi. On parle du combat des titans mais égalité jusqu’aux neiges de Russie où les deux frères d’armes font cause commune seuls contre tous. Ce qui pourtant ne règlera par leur compte.
Féraud est fils de forgeron D’Hubert est noble. Un début d’explication lié aux origines. Il va se voir accusé de ne pas aimer l’Empereur. Chute de l’Empire, les Républicains deviennent monarchistes. D’Hubert aussi mais il gardera un œil sur Féraud et l’aidera en secret. Grandeur et servitudes militaires. Conrad raconte le destin de deux frères d’armes qui ont vraiment existé. Deux esprits et âmes en acier trempé, finalement jumeaux même si très différents en apparence. Vincent Petit signe la postface de Duel et en tire les conclusions. Un parcours d’exception pour deux hommes que tout rapproche et éloigne à la fois. A la vie à la mort.
Duel, Éditions Casterman, 22 €
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