Comme annoncé dans une précédente chronique De Gaulle et Mitterrand sont devenus héros de BD en ce mois de septembre. Et dans chaque album ce sont de leurs débuts , de leur jeunesse dont il est question. On pourra même s’amuser (en toute retenue) que l’un et l’autre ait connu les camps de prisonniers allemands, De Gaulle en 1915, Mitterrand en 1940. Ils ont été des maîtres de l’évasion. De Gaulle sera repris à chaque fois. Mitterrand réussira. De quoi lui en vouloir quand même pour le Grand Charles.
Dans Mitterrand un jeune homme de droite Philippe Richelle a travaillé en détail, avec une rigueur d’historien mais aussi de journaliste sur la part la moins connue de la vie de Mitterrand, sa jeunesse et son passé ambigu, à son image, ses déambulations entre droite, pétainisme et résistance qui, pourtant, ne lui éviteront pas quelques relations coupables. Frédéric Rébéna a eu la lourde tache de donner à ce Machiavel génial de la cinquième République un visage sur papier. Sans trahir, ni exagérer, en rendant compte des sentiments d’un homme secret et opportuniste, tout en nuances, un politique en somme mais de la grande école et qui a su louvoyer, sphinx hautain et brillant, à travers tous les méandres pour accéder au sommet de l’état.
En 1935, François Mitterrand est un jeune bourgeois qui joue au tennis.IL étudie le droit et hésite avec une carrière d’écrivain. Au passage il a du charme et toute sa vie il en usera. Il n’est pas indulgent et a une grande idée de lui même. Il est proche de l’Action Français, celle de Maurras qui est de droite extrême. Le Front Populaire, La Cagoule, Deloncle, Mitterrand louvoie. Mitterrand regrette d’être né dans le mauvais siècle. Il fera avec et avec certains de ses ami embarqué dans un activisme sans appel.
Béatrice sera son premier amour. Elle a quinze ans. Il s’engage, fait la guerre avec courage et se retrouve dans un Stalag. On sait qu’il fait la belle et se rallie à Vichy, intègre les services du Maréchal curieusement, mais ce n’est pas dit dans l’album, sous les ordres de Favre de Thierrens, un aviateur de Nîmes, As de la Grande Guerre, et résistant. Favre après la guerre se consacrera à la peinture. Des femmes exclusivement.
Le cheminement de Mitterrand est alors curieux. En avril 42, il fait partie d’un groupe qui veut envoyer dans les colis des prisonniers faux papiers ou autres leur permettant de s’évader. On entre dans une phase où l’avenir de la Résistance va se jouer entre Giraud qui s’évade et De Gaulle. Giraud retrouve Pétain qu’il veut convaincre que la France doit se tenir prête à refaire la guerre contre l’Allemagne. La rafle du Vel d’Hiv apporte encore plus le doute dans l’esprit de Mitterrand. Il part en Angleterre. Mais ce ne sera pas du goût de tous les gaullistes. Mitterrand épouse Danielle.
On suit pas à pas et sans ennui ce parcours très français qui méritait d’être rappelé. Mitterrand est comme disait Amouroux l’un des 40 millions de pétainistes de ce début des années quarante. Richelle décortique ce qui doit l’être, fait les bons choix pour que l’on comprenne les multiples visages du futur président de la République. On apprend beaucoup, loin du futur défilé du Panthéon de 81 ou même de ce ministre qui décide en 1954 que l’armée doit faire son devoir dans une Algérie qui doit rester française. L’homme était aussi un timide, un brin coincé, sauf quand il s’agissait de séduire. Il restera en partie un mystère.
Mitterrand, Un jeune homme de droite, Rue de Sèvres, 18 €
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