Alors qu’on commémore le second conflit mondial, Serge Fino revient sur le premier en 14 avec le destin d’un de ces hommes, futur Poilu, qui va partir au front en août 14. Jules Matrat, une trilogie, va être le fil rouge qui montrera la vie, la mort de ces 8 millions de soldats mobilisés en quatre ans. Rien qu’en août 14 il y aura 24 000 tués. Matrat, c’est son quotidien, arraché à sa terre de Haute-Loire, qu’on suit. Banal presque mais avec la mort qui rode en permanence. Fino (L’Or des marées) a adapté en BD le roman de Charles Exbrayat.
A Chervagne le tocsin résonne en ce mois d’août 1914. Le feu dans une ferme ? Jules Matrat rencontre Marius. Le tocsin a sonné la guerre, la mobilisation générale. Contre qui ? Les Allemands bien sûr, on va reprendre l’Alsace et la Lorraine. Impossible. Jules va épouser Rose. Son père a vu les affiches. La guerre ça ne le regarde par Jules mais les Gendarmes vont distribuer les feuilles de route, le livret militaire qui va marier les hommes à l’armée. Pas le choix. Jules voit Rose. Ils sont fous au gouvernement. La guerre en pleine moisson. Uniforme garance, pluie, Jules se fait un copain Louis. Au village le maire commence à recevoir les télégrammes à transmettre aux familles des tués, un crève-cœur. Il faut remplacer le facteur qui part lui aussi à la guerre.
Une restitution simple mais on ne peut plus crédible, les souffrances, le désespoir, le deuil, les morts qui s’accumulent alors que Matrat dans les tranchées se retrouve dans les Vosges, mène sa guerre. Une ambiance lourde, pesante car très bien rendue par le très bon dessin, le découpage de Serge Fino. L’écriture est aussi riche en force, en détails comme cette veillée funèbre sans le corps, en ressenti. On pense aux Croix de Bois. Pas de héros, les copains au front, les retours en permission, des larmes et des chagrins ineffaçables, des hommes comme le dit Fino qui ne savent plus vivre. Remarquable en tout point et à méditer.
Jules Matrat, Tome 1, Éditions Glénat, 17,50 €
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