Avec son entrée au Panthéon dernièrement en compagnie de son épouse, on s’est souvenu de Missak Manouchian, du rôle des résistants communistes issus de la Main d’œuvre immigrée, tous arrêtés par une enquête de la police parisienne et fusillés par les Allemands. Quand on lit le Missak Manouchian de Jean-Pierre Pécau et Eduardo Ocana on va plus loin que le simple récit des faits. Il y a eu dans le drame de l’affiche rouge une dimension politique liée au PC de l’époque. 1943 à Paris ce sont les FTP Francs Tireurs Partisans qui mènent la danse par rapport aux FFI Forces Françaises de l’Intérieur gaullistes. Les FTP sont décimés, le Parti donne les ordres venus de Moscou. Manouchian monte son groupe, agit mais comment et pourquoi a-t-il était arrêté ?
Attentats, soldats abattus dans la rue par des Résistants communistes peu armés, Londres ne veut pas les ravitailler de crainte d’une prise de pouvoir à la Libération (on le verra avec Rol Tanguy face à Leclerc en août 44). Missak Manouchian sait que les cadres du parti l’ont nommé alors qu’il ne connait rien de l’action militaire. Il va vite apprendre et comprendre que vu ce qu’on lui demande la mort sera au rendez-vous. Pas le choix, le PC est exsangue sur Paris hormis la M.O.I. Et il doit montrer qu’il est à la pointe de l’action. Thorez est en URSS, Duclos qui sera déporté, Tillon qui lui n’est pas aux ordres de Moscou, Frachon doute comme on le dit beaucoup plus tard dans un débat à la TV. Il y a aussi le Groupe Valmy chargé de faire le ménage en interne. Un album très bien conçu et riche en informations.
La Police française, la BS2, va remonter la piste de la M.O.I. Et en sera aussi la cible comme en 1943. Manouchian a été sacrifié pour que le PC ait le temps de reconstituer ses réseaux et que ses dirigeants restent en place. On oubliera le terme de M.O.I. dans le discours officiel, un peu comme les Républicains espagnols de la Nueve qui avec la 2e DB seront les premiers à entrer dans Paris car la Résistance devait être française de souche, pas juive ou arménienne. Il faudra attendre la chute du PCF vers les années 80 pour que la M.O.I. soit reconnue. Le piège se refermera sur Manouchian et il y aura aussi des dénonciations. Trotskisme ou pas, trahison, devenu gênant ? Pas de preuves tangibles et la M.O.I. aussi servira aux Allemands de prétexte pour qualifier la Résistance d’armée du crime avec l’Affiche rouge.
Missak Manouchian mort pour la France, Delcourt, 15,95 €
Articles similaires