Quand on feuillette La Fabrique de héros, anthologie de 100 ans d’édition chez Dupuis, on a l’impression de tourner les pages d’un album de famille. Encore plus évident pour les « vieux » lecteurs de Spirou depuis les années 50 et qui le sont encore aujourd’hui. José-Louis Bocquet et Sergio Honorez, piliers de la maison à plus d’un titre, ont raconté dans ce recueil cent anecdotes, une par an faisant ressurgir passé et présent voire avenir mais ça c’est une autre histoire de Dupuis. De Spirou à Jerry Spring, l’Oncle Paul, Aire Libre, Gil Jourdan, Buck Danny bien sûr, Starter, Gaston évidemment on se rend compte du poids des éditions Dupuis au sein du monde du 9e art. Majeur et incontournable. Impossible de citer tout ces héros de papier qui ont bercé des vies entières depuis l’avant-guerre, aidés aussi des générations de gosses à passer des caps difficiles, à partager un amour commun de la BD sans savoir car ils s’en moquaient qu’elle allait devenir un art majeur.
Jean Dupuis sera le créateur d’un monde. De Bonne Soirées au Moustique, Dupuis sera un imprimeur éditeur visionnaire et Spirou en 1937 la cerise sur le gâteau. Rob-Vel et le premier journal illustré pour la jeunesse, les ADS en 1938, Tif et Tondu, Spirou se forme, évolue, se féminise très vite certes avec parcimonie mais maintiendra le cap au fils des ans pour arriver à l’équilibre au sein de la publication aujourd’hui. Et il y aura cette idée géniale, faire des recueils avec les invendus du journal. Cadeau de communion, de Noël, ils deviendront des collectors et permettaient si on tombait bien de lire une histoire d’une traite. 1940 et la guerre seront des tournants. Arrêt du journal en Belgique, Doisy et la Résistance, Jijé dessine le groom, Charles Dupuis gère. C’est parti.
Pas de prétention dans Spirou, divertir, animer, plaire à une jeunesse en mal de héros sympathiques, on enchaîne et on est étonné par cette Fabrique bien mise en scène par les deux auteurs. Une richesse de création à nulle autre pareille. Lucky Luke, Johan et Pirlouit qui poussent les Schtroumpfs en vedette, les mini-récits qu’on détachait du centre du journal, Boule et Bill, Bobo, les gags de Poche au format polar de gare mais la censure aussi celle de la loi de 1949 en France, Spirou est une aventure unique. Ses concurrents potentiels ne sont plus là de nos jours. Contre vents et marées, Spirou persiste et signe, accueille un nouveau public en permanence. Aux grands-pères de transmettre le flambeau. On s’y emploie.
La Fabrique de héros, 100 ans d’édition chez Dupuis, Dupuis, 34 €
Articles similaires