Du 13 janvier au 18 février 2023, la galerie Huberty & Breyne de Bruxelles présente une exposition monographique d’Albert Dubout (Marseille, 1905 – Saint-Aunès, 1976). Albert Dubout a été un Nîmois puis un Montpelliérain d’adoption pour ses études malgré une naissance à Marseille. C’est à Montpellier que paraisse ses premiers dessins dans un journal étudiant. Très attaché à la région, il reviendra souvent à Palavas-les-Flots (où un musée dans la Redoute au milieu de l’étang lui est dédié) et dessinera avec humour le célèbre petit train qui y mène depuis Montpellier. C’est à Saint-Aunès près de Montpellier qu’il mourra et où il est enterré. A noter aussi qu’il y a quelques années on a retrouvé dans un bar sur la Place de la Comédie à Montpellier une fresque que Dubout avait peinte sur le mur. Le vernissage a lieu le jeudi 12 janvier 2023 de 18h à 21h en présence de Didier Dubout, son petit-fils qui tiendra une conférence, Dubout, sa vie, son œuvre, ses engagements le samedi 21 janvier à 15h30 à la galerie 33, place du Châtelain 1050 Bruxelles. A ne pas manquer si vous passez par la capitale belge.
Un ensemble inédit de planches, d’encres de Chine et d’aquarelles de Dubout, qui pour beaucoup d’intellectuels, de dessinateurs et d’artistes contemporains (Cabu, Wolinski, Plantu, Cavanna) est considéré comme le plus grand dessinateur français du vingtième siècle, y sera dévoilé. Albert Dubout ayant brûlé de son vivant une partie importante de son travail, les ventes de ses œuvres sont extrêmement rares. En cinquante ans les dessins de presse et les illustrations de cet artiste de talent ont marqué plusieurs générations. Dubout est le seul dessinateur au monde à avoir maîtrisé l’ensemble de l’art graphique. Il travailla pour plus de 250 journaux en France et à l’étranger, avec 5 milliards de lecteurs (la moitié de ses dessins étant parus en couverture). Il illustra également 67 ouvrages classiques dont François Villon, Molière, Voltaire, Honoré de Balzac, Edmond Rostand et Marcel Pagnol (sans oublier les aventures du commissaire San Antonio à la demande de Frédéric Dard dont l’Histoire de France vu par San Antonio en 1965, NDLR).
Il publia plus de 130 albums édités dans le monde entier, dont certains ouvrages à plus d’un million d’exemplaires. Également peintre, avec 77 huiles sur toile exposées en France (Centre Pompidou, BnF François Mitterrand) et à l’étranger (Japon, Allemagne, Suisse, Canada). Il conçu aussi 86 affiches, dont une grande partie pour les films de Marcel Pagnol (on se souvient de César, Fanny et Marius, la trilogie NDLR) et réalisa également 3 dessins animés, 2 films pour le cinéma, de grandes campagnes publicitaires, des décors de théâtre, des vitrines animées pour les Galeries Lafayette…
Albert Dubout travaillait à l’encre de Chine à l’aide d’une plume en acier spécialement fabriqué en Angleterre. C’est avec cette plume et une grosse loupe qu’il exécutait ses dessins, dont la finesse du trait est exceptionnelle. Il fut l’auteur de planches avec plusieurs centaines de personnages. Ses foules sont structurées et d’une grande précision, leur mise en scène soignée, avec la présence de plusieurs plans, unique dans l’histoire du dessin. Décoré de la Légion d’honneur par le président Vincent Auriol, il entra dans le dictionnaire Larousse la même année que Pablo Picasso. Albert Dubout, artiste simple et discret, fuyait les interviews et les honneurs des plateaux.
Les signatures de Dubout ou plutôt les familles de signatures sont le reflet de l’imagination de l’artiste. Elles témoignent d’une volonté d’évolution et de recherche, si l’on fait abstraction d’une petite pointe d’orgueil pour attirer l’œil du lecteur sur une signature unique en son genre et rappeler qu’il s’agit bien d’un dessin de Dubout surtout en référence à Charles Trenet, en signant Le fou dessinant. La précocité de cet artiste est unique à cette époque (période où les dessinateurs étaient nombreux et talentueux, faute de photographies). En effet, les premiers dessins de presse paraissent dès 1923. Or, il n’a pas caché le fait que de nombreux dessins, parus le plus souvent dans les almanachs et dans Paris Minuit en 1924 ont été réalisés vers 1920, à l’âge de quinze ans.
Tous les sujets, sans tabou, ont été traités par Albert Dubout. La représentation de la femme castratrice, martyrisant son mari est, au-delà de l’humour, une volonté de dénoncer, avec une grande anticipation sur la société moderne, la violence conjugale. Chez Dubout, la femme des années 1920 et 1930, est une femme libérée et provocatrice, anticipant sur la liberté sexuelle et sur le mouvement de libération des femmes (bien qu’existant déjà au Royaume-Uni ). Le couple à la Dubout est asexué, mais pour le mari, c’est sur la femme de l’autre que porte son intérêt. Chez Dubout, la famille est incomplète. En effet, les enfants y sont peu représentés à l’exception des dessins de jeunesse. L’enfant, le plus souvent de sexe masculin, est impertinent et parle comme un adulte, en traitant des sujets d’actualité, souvent politiques. La société bourgeoise, surtout pendant la crise économique d’avant-guerre, est largement caricaturée avec peu de tendresse. À l’inverse, les pauvres sont représentés par des dessins bouleversants dont le plus représentatif est celui concernant La saisie.
Au fil des ans, sa vue prenant de l’âge et une demande de plus en plus pressante des directeurs de presse le contraignirent à modifier son style en l’épurant et en lui donnant un aspect plus humoristique. Les légendes se modifient également en se contractant, voire sans parole à compter des années 1960. Ses légendes deviennent alors extrêmement travaillées, courtes et efficaces. L’humour se trouve alors un équilibre entre dessin et légende. Albert Dubout a constamment exploré des thèmes nouveaux. Les photographes, les peintres, les policiers et gangsters, le vélo, les voitures, la mythologie, paraîtront soit sur des pleines pages, soit de façon hebdomadaire, et, pour un grand nombre d’entre eux feront l’objet d’albums thématiques.
L’exploration se fera également par quelques montages photographiques avec ses dessins en surimposition.
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