Lee Miller, Gerda Taro, Catherine Leroy, Christine Spengler, Françoise Demulder, Susan Meiselas, Carolyn Cole, Anja Niedringhaus, des femmes photographes de guerre, l’honneur d’une profession qui aujourd’hui encore que ce soit en Ukraine ou ailleurs est sur le terrain pour trouver, prouver l’information, la montrer, de façon plus forte encore qu’un film ou même un article. L’exposition qui se tient à Paris dans le cadre du Musée de la Libération est à voir absolument et à rattacher aux albums BD parus sur Lee Miller ou Taro à travers celui consacré à Capa. Le poids et le choc des photos comme disait Match est à nul autre pareil. L’exposition est co-organisée avec le Kunstpalast de Düsseldorf et dure jusqu’au 31 décembre 2022. Entrée payante mais gratuite pour visiter ensuite le Musée de la Libération de Paris et le PC sous-terrain de Rol Tanguy, un de ceux qui a dirigé l’insurrection en 1944.
Pour faire court et bien placer le contexte voici le résumé de l’exposition : avec cette nouvelle exposition, le musée de la Libération de Paris – musée du général Leclerc – musée Jean Moulin continue d’explorer l’histoire en présentant les œuvres de huit femmes photographes reconnues qui ont couvert 75 ans de conflits internationaux entre 1936 et 2011 : Lee Miller (1907-1977), Gerda Taro (1910-1937), Catherine Leroy (1944-2006), Christine Spengler (née en 1945), Françoise Demulder (1947-2008), Susan Meiselas (née en 1948), Carolyn Cole (née en 1961) et Anja Niedringhaus (1965-2014). À l’aide d’une centaine de documents, plus de 80 photographies, ainsi qu’une douzaine de journaux et de magazines originaux, l’exposition met en évidence l’implication des femmes dans tous les conflits, qu’elles soient combattantes, victimes ou témoins.
Dans une ambiances sobrement éclairée, feutrée, les photos prennent tout leurs sens. C’est vrai qu’à titre personnel on a toujours eu un faible, une affection particulière pour Lee Miller. Une carrière de modèle, muse de Man Ray qui l’éduque à la photo, proche des surréalistes, de Picasso qu’elle retrouvera à la Libération de paris, elle sous l’uniforme américain qu’elle portera aussi à la libération des camps de la mort. Une très grande dame, comme Taro dont le talent a été un peu éclipsé par celui de son amant Capa pendant la guerre d’Espagne où elle meurt. Et puis il y a Catherine Leroy, feu-follet de génie qui couvre entre autres le Vietnam à l’époque où un journaliste avait presque tout pouvoir, prioritaire parmi les troupes US. Christine Spengler, Françoise Demulder, Susan Meiselas, Carolyn Cole, Anja Niedringhaus, le panel est superbe, prenant. On passe du XXe au XXIe siècle. Certaines ne sont plus là bien sûr. On est touché par ces clichés, cette émotion, la violence et la tristesse, la mort omniprésente mais le sourire de ces femmes est malgré tout est rassurant. Elles sont prises par l’instant qu’elles vivent au bout de leurs objectifs.
Il faut aller voir cette exposition car si la photographie de guerre est une profession dominée par les hommes, de nombreuses femmes photographes ont cependant travaillé dans les zones de guerre. Elles ont documenté les crises mondiales et ont joué un rôle décisif dans la formation de l’image de la guerre. Dans les territoires de conflit, contrairement aux hommes, ces femmes ont souvent eu accès aux familles, dont elles ont réalisé des portraits particulièrement émouvants. Elles ont également été actives sur le front et pris des photos de victimes de guerre qui n’épargnent pas l’observateur. En mettant en lumière les clichés et parcours de ces huit femmes photographes de guerre, l’exposition confronte le visiteur à un regard partagé sur la violence de la guerre. Elle questionne la notion de genre, interroge la spécificité du regard féminin sur la guerre, bouscule certains stéréotypes, montre que les femmes sont tout autant passeuses d’images que témoins de l’atroce. Sur les fronts depuis près d’un siècle, elles prennent des images sans cacher l’horreur des événements. Certaines y laissent la vie.
Et un denier au revoir à Brigitte Friang qui de la guerre d’Indochine française où elle a sauté en opérations, à Suez, la Guerre des six jours ou au siège de Khe Sanh a fait partie de cette élite très fermée.
Leur rendre hommage et être pris par leurs photos, captivé, bouleversé est bien le moins que l’on puisse faire, un moment d’exception. Un conseil, achetez le catalogue en anglais de l’exposition très complet et fait pour l’exposition du Kunstpalast de Düsseldorf.
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