On sait quand on voit le nom de Salva Rubio sur un album que c’est une garantie de qualité, de travail d’un historien, d’un passionné d’art que l’on suit depuis Monet ou Le Photographe de Mathausen. Plus récemment Les Zazous. On sait aussi qu’il a le don de bien choisir ses dessinateurs. C’est le cas avec le premier tome d’une biographie de Brel, une vie à mille temps. Sagar a extrait toute l’ambiguïté et le mal être, le talent évidemment et le désespoir, le drame permanent. Le texte de Rubio dépasse le simple cadre du récit.
Un angoissé chronique, Brel qui est un aventurier en chambre quand il est jeune. Et comment accomplir ses rêves devenu adulte dans une famille industrielle belge qui voit en lui le successeur ? Il vend du carton ondulé, sa voie est tracée, la routine mais il y a la musique, les paroles avec la Franche Cordée. Il va faire l’acteur avec ses camarades, s’évader le week-end, se marier avec Miche, avoir des enfants. Il aimerait que la vie soit une pièce de théâtre où l’on puisse changer de rôle. Son père lui donne un an pour réussir, devenir un chanteur reconnu. Décidé mais encore plus angoissé, Brel part à Paris. L’Olympia ou rien.
Le chemin va être pavé de ronces. Brel angoissé chronique vomit avant de rentrer sur scène. Chaque fois. Brassens est là, le surnomme l’abbé. On découvre que Brel a été un grand amoureux, certes de sa femme mais aussi de noms illustres de la scène comme Suzanne Gabriello (pour s’en souvenir c’est une question de génération). Gréco qui va croire en lui, Catherine Sauvage le démolira par contre mais ensuite… On retrouve Philippe Clay, Dario Moreno, Aglaé, Mouloudji, Françoise Dorin, Perrette Souplex, Aznavour, Gainsbourg qui lui aussi va voir le talent immense de Brel, l’élite de la fin des années 50. Brel déteste la vulgarité de Sidney Bechet. Brel ce sera la galère jusqu’au jour où. On aime ou pas Brel. Il reste cependant un phénomène rare, unique dans l’histoire de la chanson, peut-être aussi parce que sa vie sera tragique et pas vraiment un exemple de joie de vivre communicative. Un écorché vif.
Brel, Une vie à mille temps, Tome 1, Quand on n’a pas que la musique, Glénat, 15,50 €
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