Marc Védrines cherchait un personnage ambigu pour en faire un héros de BD. Avec Edgar Hoover, inamovible directeur à vie du célèbre F.B.I. américain, il ne pouvait mieux choisir. Dans La Main de Dieu (Glénat), il décrypte les secrets et les manipulations de Hoover qui fera tout pour rester au pouvoir et réussira quelque soit le Président. Dans le tome 2 de la série, Marc Védrines montre comment Hoover prend définitivement les rênes de l’administration policière fédérale. Ligne Claire a rencontré Marc Védrines au dernier Salon du Livre. On connaît Hoover, son nom mais pas vraiment le personnage ou alors par des rumeurs qui lui sont attachées.
Pourquoi ce choix ?
Effectivement on croit le connaître mais c’est faux en fait. Bien avant le film de Clint Eastwood, J.Edgar qui raconte sa vie, je cherchais un personnage ambigu, ambivalent, dans l’histoire contemporaine. Il me fallait un sujet inexploité. Il y a eu une BD mais pas très bonne sur Hoover. Je me suis focalisé sur lui, sur ce personnage hors normes.
Vous avez beaucoup travaillé, fait des recherches poussées.
Oui, j’ai rassemblé une énorme documentation, j’ai fait un vrai travail de fond. Cela dit je ne suis pas historien. Je voulais rendre le sujet ludique mais tous les faits sont réels comme les personnages. J’ai rajouté très peu de choses.
Quand on parle de Hoover, on pense à loi du silence, à dossiers secrets.
Hoover était un bon petit soldat, très efficace. Il a décidé de faire parler du F.B.I. où il a été nommé à la direction par dépit. Il était aux archives. Et il décide qu’il restera en poste. Quand il est mort en 1972, après 48 ans à la tête du F.B.I., une loi limitera désormais à dix ans le mandat. Mais il aura été présent pour toutes les grandes affaires du siècle. Les dossiers, beaucoup ont été détruits mais ils existaient. Son compagnon Clyde Tolson a fait le ménage.
Dans le tome 2 on voit comment il gère l’enlèvement du bébé des Lindbergh et comment ensuite à cause de lui les kidnappings deviennent un crime fédéral géré par le F.B.I.
Oui, dans ce tome 2 il assure l’avenir. Il fait un travail de communication remarquable pour la promotion du Bureau d’Investigation. Dans le tome 3 on sera à la veille et pendant la seconde guerre mondiale, puis la fin des années 50 jusqu’à Nixon. On verra comment il se positionne avant Pearl Harbor, opération sur laquelle il a des informations. Hoover devient peu à peu l’homme le plus puissant du XXe siècle. Paradoxalement il n’a jamais voulu devenir Président des Etats-Unis tout simplement parce que le mandat était trop court. Quatre ou huit ans maximum cela ne lui suffisait pas alors qu’il est resté près de cinquante ans au F.B.I. Par contre il aurait bien voulu prendre la tête de la C.I.A.
Autre grand mystère sur lequel plane l’ombre de Hoover, c’est l’assassinat de John Kennedy.
Hoover sait sûrement la vérité mais n’est pas un commanditaire. Le nombre de coups de feux, de tireurs, je pense qu’Oswald est un bouc émissaire. Johnson lui aussi sait et plus encore les pétroliers texans. Qui a étouffé les preuves, nettoyé ? Kennedy avait focalisé les haines. Pour Hoover il y aussi une part de fantasmes dans ce qu’on pense qu’il savait ou a fait. On ne sait pas tout. Il faut recouper les sources en permanence.
Finalement l’ère Hoover a quand même eu quelques avantages ?
Hoover est à l’origine de la police scientifique. Rigueur, méthode, archives, agents irréprochables, il veille à tout. C’est un type assez honnête mais qui a sa propre vision de la justice. Il ferme les yeux sur la mafia. On pense qu’elle le tient par ces photos et peut-être par des tuyaux sur des courses truquées qui lui ont permis de gagner de l’argent.
Et après Hoover on peut avoir une autre vie ?
Le tome 3 de Hoover sort en janvier prochain et clôture la série. Mais je n’ai pas le temps de travailler à nouveau seul sur un projet comme Hoover où j’assume scénario et dessin. J’ai une idée sur la guerre d’Algérie et participerai à une série sur les Sept Merveilles du Monde en trois albums.
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