Olivier Speltens était à Angoulême. Le tome 2 de L’Armée de l’ombre dont il est l’auteur vient de sortir chez Paquet. Histoire de guerre, celle d’un soldat de l’armée allemande sur le front de l’Est, sa série est très documentée, réaliste, bien dessinée et n’occulte rien des tragédies de cette époque. Olivier Speltens a dit à Ligne Claire pourquoi il s’était lancé dans cette aventure graphique et historique.
Olivier Speltens, vous êtes Belge. Vous vous sentiez concerné par la seconde guerre mondiale ?
Oui, la Belgique a été aux premières loges comme la France. On a été occupé lourdement. J’ai fait beaucoup de maquettes sur cette époque, une vraie passion. Je me demandais comment j’aurai réagi si j’avais vécu ces évènements mais ce qui m’intéressait le plus était le côté humain de la guerre. J’avais aussi beaucoup lu de BD de guerre.
Comment avez vous bâti votre scénario ?
Je me suis appuyé sur les récits d’anciens combattants allemands, ce qu’ils ont vécu, en particulier sur le front de l’Est après l’offensive allemande de 1941, Stalingrad, la bataille de Koursk et ensuite la retraite et la chute de Berlin. On a beaucoup parlé de Stalingrad mais il y a des sujets moins connus.
Vous avez mélangé les témoignages ?
Oui, le héros Kessler va vivre la totalité de la campagne. Il est une synthèse. Ce n’est pas un nazi convaincu. Il est comme pas mal de ses compatriotes embarqué dans une aventure qui va mal finir mais dont il a été plus ou moins fier au départ. Kessler est le fil rouge qui me permet de raconter les conditions de vie de ces soldats.
Vous montrez qu’ils ne savent pas vraiment où ils en sont.
Ils vivent une totale désinformation au moins au niveau de la troupe. Ils n’ont pas d’informations. Le soldat n’a pas le droit de savoir si il gagne ou si il perd. La propagande est partout et le front est gigantesque. La prise de conscience date de 1943. Les 30, 40 ans râlaient et doutaient. Les jeunes se sentaient invincibles et pensaient être les meilleurs soldats du monde. Ils faisaient une guerre très moderne.
Combien d’albums au total pour cette Armée de l’Ombre ?
Quatre qui vont couvrir toute la guerre jusqu’au 8 mai 1945. J’ai eu besoin pour les faire d’un énorme documentation. Je suis en contact permanent avec le Musée Royal de la Guerre à Bruxelles. Cela m’a beaucoup aidé pour le matériel de l’époque, pour les uniformes. Et pas mal de lecteurs m’ont aussi proposé leur aide. J’ai amélioré mon travail. On ne peut pas se permettre aujourd’hui d’erreur dans ce genre de récit. Les lecteurs sont souvent des connaisseurs et des férus d’Histoire contemporaine.
Ce n’est pas simple de parler de cette époque et surtout vu du côté de l’armée allemande ?
Oui, mais il faut être objectif, ne rien cacher. Il y a des choses qui étaient abominables, on le sait. C’était une guerre de haine totale, avec une surenchère de l’horreur. L’Armée de l’ombre ne va jamais rentrer chez elle. C’est une génération sacrifié et la raison du titre de la série. Dans le tome 2 qui vient de sortir c’est la guerre, les vagues soviétiques, le début de la fin. Dans le 3, ce seront les exactions, la politique de la terre brûlée de part et d’autre. Dans le 4, on verra une armée qui meurt de faim et agonise.
Je n’ai pas voulu édulcorer quoique ce soit. A la fin les soldat allemands fuyaient vers l’Ouest pour être capturés par les Américains et surtout pas par les Russes.
Comment travaillez-vous ?
Sur un format 35cm par 46, de façon traditionnelle, crayon, encrage. Les couleurs sont faites sur ordinateur. Il ne travaille pas pour vous mais reste un outil fantastique qui rend la vie plus simple.
Après L’Armée de l’Ombre qu’auriez vous envie de faire ?
Pourquoi pas une uchronie. Je sais que c’est tendance mais cela me tenterait.
L’Armée de l’ombre, Tome 2, Le réveil du géant, Paquet, 14 €
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