Emmanuel Guibert sera l’invité de l’Académie des beaux-arts du 9 septembre au 18 octobre 2020 pour une exposition autour de ses biographies en bande dessinée consacrées à ceux qu’il considère avant tout comme ses amis, l’ancien G.I. Alan Ingram Cope et le photo-reporter Didier Lefèvre. Ces hommes se racontent dans La guerre d’Alan, l’Enfance d’Alan, Martha et Alan (L’Association) ou Le photographe (Dupuis). L’exposition se déroule Pavillon comtesse de Caen à l’Académie. A noter que cette exposition s’inscrit dans le cadre de BD 2020, année nationale de la bande dessinée.
De nombreux dessins seront montrés, accompagnés de récits, photographies, diaporamas ainsi que d’objets qui concourent à l’évocation de deux vies confrontées à l’histoire de leur temps, la crise de 1929 en Californie et la Seconde Guerre mondiale en Europe pour l’une, l’Afghanistan des années 1980 occupé par l’Armée rouge pour l’autre. En plus d’illustrer la profonde adéquation entre bande dessinée et biographie, l’exposition Biographies dessinées est la première exposition que l’Académie des beaux-arts consacre à la BD au Pavillon Comtesse de Caen.
Voici ce qu’a déclaré Emmanuel Guibert au sujet de son exposition : « Je suis heureux de vous présenter Alan Ingram Cope, soldat américain de la Seconde Guerre mondiale et Didier Lefèvre, reporter-photographe. Je leur consacre des livres. Quand ils étaient vivants, la préparation de ces livres nous donnait un alibi pour nous voir beaucoup. Aujourd’hui, ils me permettent de continuer à m’occuper d’eux. Quand un dessinateur a envie de célébrer un ami présent ou de revoir un ami absent, il a la ressource de le dessiner. Quand il veut l’entendre, il place une bulle devant ses lèvres et lui fait prononcer une phrase. Ainsi s’instaure une conversation qui peut accoucher de milliers de dessins et de phrases consécutifs; ce qu’on appelle une bande dessinée. Je raconte des vies en bande dessinée. Il y a deux catégories de gens dont je ne ferai jamais la biographie, les gens connus, les gens que je n’ai pas connus. » Et d’ajouter : « Je ne dessine et n’écris que des biographies d’amis qui me disent leur histoire de vive voix, dans un lieu propice, en buvant, en mangeant, en feuilletant des photos ou en arrosant un jardin, sans compter leur temps ni leur confiance. Il s’agit toujours d’un moment de leur parcours où une certaine vulnérabilité, un relatif désœuvrement favorisent notre échange. L’exercice nécessite que je les aime jusqu’à l’admiration mais doit aussi leur faire du bien. Sans ces dispositions, je suis incapable de leur consacrer le moindre trait. Dans ces dispositions, je leur dédie volontiers des années de travail. »
Emmanuel Guibert est né en 1964 à Paris. Il débute sa carrière dans la bande dessinée avec Brune, une œuvre sur la montée du nazisme dans un style graphique très minutieux qu’il abandonnera vite. L’album, qu’il met sept ans à réaliser, paraît en 1992. Fréquentant les auteurs de la toute jeune maison d’édition L’Association, il commence à publier des récits dans la revue Lapin, et intègre l’atelier des Vosges aux côtés notamment d’Émile Bravo, Christophe Blain et Joann Sfar. Sur un scénario de ce dernier, il dessine La fille du professeur, Alph’art coup de cœur et Prix René Goscinny au Festival d’Angoulême en 1998. Emmanuel Guibert y met en place un dessin en sépia, sensible et souple, un style graphique que, versatile, il abandonne pour Le Capitaine écarlate avec David B au scénario (2000), album d’une facture très différente.
Toujours avec Joann Sfar, il débute en 1997 la série pour enfants Sardine de l’espace dont il écrit d’abord le scénario avant d’en assurer aussi le dessin. Il laisse libre cours à sa fantaisie et développe son formidable talent de conteur. Il dessine à partir de 2001 la série Les Olives noires (3 volumes) sur un petit garçon juif en Judée il y a 2000 ans, encore avec Joann Sfar au scénario, de nouveau dans un style inédit. En 1996, Emmanuel Guibert débute en revue la publication d’un projet ambitieux et de longue haleine, une suite d’albums inspirés par les souvenirs de son ami américain Alan Ingram Cope, La Guerre d’Alan (trois volumes de 2000 à 2008), L’enfance d’Alan (2012), Martha et Alan (2016). Emmanuel Guibert excelle à mettre en scène la vie d’Alan, exposant l’intime avec une pudeur subtile. Ce travail de passeur de mémoire se prolonge dans Le Photographe (trois volumes de 2003 à 2006), inspiré des souvenirs et des photos rapportés de voyages en Afghanistan avec Médecins sans Frontières par le photojournaliste Didier Lefèvre. Photos et dessins se complètent et se confondent, pour mieux fixer le temps et les souvenirs.
Le Photographe sera récompensé à travers le monde avec le prix Essentiel d’Angoulême en 2007, le Eisner Award de la meilleure édition américaine d’une œuvre internationale et le Prix Micheluzzi de la meilleure série étrangère en 2010. On trouve son intérêt pour l’autre aussi bien dans Des nouvelles d’Alain, livre sur les communautés roms d’Europe réalisé avec Alain Keler, que dans l’irrésistible série pour la jeunesse Ariol qu’il crée en 2000 avec Marc Boutavant au dessin. Là, sous couvert de raconter les aventures d’un petit âne anthropomorphe, il explore la vie moderne et le quotidien à hauteur d’enfant, faisant pour cela appel à ses propres souvenirs. Pour l’ensemble de son œuvre, Emmanuel Guibert reçoit en 2017 le Prix René Goscinny et, en 2020, le Grand Prix du 47e Festival International de la bande dessinée d’Angoulême.
Emmanuel Guibert – Biographies dessinées
du 9 septembre au 18 octobre 2020
Académie des beaux-arts
Pavillon Comtesse de Caen, Palais de l’Institut de France
23 Quai de Conti, 75006 Paris
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