Un conte philosophique sur les besoins jamais satisfaits du genre humain, Martin Veyron, avec tout l’humour et la sensibilité qui l’habite, son élégance, a adapté Ce qu’il faut de terre à l’homme, une nouvelle de Tolstoï d’une brûlante actualité. Martin Veyron suit les traces d’un brave type en fait qui essaye à la fois de s’en sortir mais aussi de devenir puissant. Et à l’époque, celle des Tsars, il fallait avoir de la terre, beaucoup de terre et, si possible, faire travailler les autres. Ce qui n’a pas vraiment changé aujourd’hui, même si la terre a été remplacée souvent par un nombre incalculable de biens de consommation courante. Mine de rien semblant de tout, Martin Veyron qui est un fin scrutateur de la vie de la cité dans journaux et hebdomadaires, démontre qu’au final nos besoins sont très limités.
Un paysan modeste mais malin se voit sermonné par le fils de la propriétaire du grand domaine qui jouxte ses lopins. Il ne respecte pas vraiment les clôtures ce qui va obliger la comtesse à embaucher un régisseur pour surveiller les moujiks. Le fouet ou une amende si il y a tricherie. Pas question pour le paysan de rester un petit propriétaire mais il est obligé d’envoyer son fils travailler pour la comtesse ce qui va lui permettre d’apprendre une nouvelle qui peut lui être très favorable, la vente du domaine. Désormais rien ne va plus arrêter les appétits du paysan affamé de terres qui va oublier qu’il a été faible et exploité.
Une fuite en avant, dont on sent la montée en puissance parfaitement mise en images par Martin Veyron qui a revu les dialogues, les rendants percutants, précis et dans le ton du récit. Le découpage est aussi bien étudié et s’appuie sur un dessin toujours aussi savoureux de l’auteur de Bernard Lermite ou de Blessure d’amour propre, de Marivaudevilles de nuit, Grand Prix d’Angoulême 2001. Un plaisir de le retrouver dans un ouvrage tout en finesse.
Ce qu’il faut de terre à l’homme, Éditions Dargaud, 19,99 €
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